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Par Eric Ruiz
Ce n’est vraiment pas mon habitude de parler de philosophie. Mais je me suis rappelé un très ancien cours de philo sur Platon.
Platon, philosophe du Vème siècle, plus de 400 ans avant Jésus-Christ (un contemporain du prophète Malachie) est considéré comme un des pères de la philosophie. C’est un incontournable des étudiants.
Platon est le seul à avoir donné une allégorie (une image) très
parlante de ses théories. Et en relisant le texte sur « le mythe de la caverne », j’y ai vu
tellement de parallèles avec la Bible et de similitude avec la foi chrétienne.
Platon y révèle la nature de notre réalité tout en montrant que la quête de
la vérité a toujours été dans nos gènes, mais qu’elle est un combat. Je vous
dresse ici les grandes lignes :
Imaginez une caverne sombre où un groupe de prisonniers est enchaîné depuis leur naissance.
Ces prisonniers sont enchainés aux pieds et au cou de telle manière qu'ils ne peuvent regarder que vers un mur devant eux.
Derrière les prisonniers, il y a un feu,
et entre le feu et les prisonniers, il y a un chemin surélevé.
Le long de ce chemin, des gens passent
en portant des objets et des figures de formes diverses qui projettent des
ombres sur le mur que les prisonniers peuvent voir.
Pour ces prisonniers, ces ombres sont la
seule réalité qu’ils connaissent.
Les ombres dans la grotte symbolisent l’ignorance et la perception limitée
de ceux qui n’ont pas atteint la vraie connaissance.
Ces ombres représentent une réalité déformée et superficielle. Les ombres
sont la façon dont les apparences et les perceptions peuvent tromper notre
compréhension de la vraie nature des choses.
Nous sommes en fait là dans l’illusion
de notre savoir. Nous pensons parce que nous avons une idée ou une opinion
de ce que nous percevons (les ombres sur le mur) que c’est la réalité. Ces
ombres, en fait montrent même pour un croyant en Dieu, qu’il se fit à ce
qu’il voit ou perçoit par ses sens. Et c’est sa conception personnelle des
choses qui le rend prisonnier de lui-même.
« Ce n'est pas à l'intelligence que l'insensé prend plaisir,
C'est à la manifestation de ses pensées. » (Proverbes18 :2)
Ces chaines qui immobilisent sont bien moins importantes que celles que
chacun a dans son esprit. Celui qui a la foi dira « mais non, j’ai la foi
et je vois la vraie réalité ». Mais attention sa foi ne s’est-elle pas
mélangée avec un conditionnement humain ? Toutes ses figures sombres qui passent et
repassent sont toutes des projections de la réalité. Ce sont des images par
exemple d’un oiseau. Mais ce n’est pas un oiseau. Il lui manque une dimension,
la couleur, l’épaisseur, la vie en somme.
Or, ces ombres sont des reflets de
la réalité. A force de passer devant eux, le sens donné à ces ombres va
conditionner les prisonniers. Platon montre avec son allégorie, ce qui se passe
dans l’esprit de n’importe qui : l’être humain naturellement fixe sa
croyance sur des opinions qui sont par nature subjectives. Il confond le réel
qu’il perçoit avec la réalité. Et cette croyance est d’autant plus forte qu’il
n’est pas le seul à y croire. Ici le groupe des
prisonniers peuvent s’entretenir et
donc ils vont partager les opinions qu’ils ont des figures ou des formes des
ombres ; et ils vont finir par baser leur conviction sur une opinion
admise par tous. Et le fait qu’ils aient tous été prisonniers depuis leur
naissance, produit le même effet que les traditions font sur nos convictions.
Elles renforcent leur crédibilité, les rendent encore plus vraies.
C’est l’erreur qu’a fait aussi Thomas le disciple de Jésus en ne regardant
qu’aux ombres (ce que font toujours une majorité de croyants d’ailleurs).
Thomas plaça sa foi sur ce qu’il voyait (les plaies sur le corps de Jésus). « Jésus lui dit: Parce que tu m'as
vu, tu as cru. Heureux ceux qui n'ont pas vu, et qui ont cru! » ; C’est : heureux ceux qui
placent leur foi ailleurs que dans leurs sens et leurs opinions parce qu’ils
verront alors la vérité.
Maintenant Le mythe de la caverne va prendre
une tournure très différente à partir du moment où l’un des prisonniers est
libéré. Et là un verset de
l’Evangile de Jean me saute à l’oreille : (« Et
vous connaîtrez la vérité, et la vérité vous rendra libres ». Jean 8 :32 )
Au début, ce prisonnier ressent une
douleur aiguë et une confusion intense lorsqu'il est exposé à la lumière du feu
et, éventuellement, au soleil du monde extérieur.
La lumière est aveuglante et le
prisonnier peine à comprendre cette nouvelle réalité.
Petit à petit, ses yeux s'habituent et
il commence à voir le monde tel qu'il est : les couleurs, les formes,
l'immensité du ciel et l'éclat du soleil.
Pour le philosophe, ce processus symbolise le chemin vers la connaissance et
l’illumination intellectuelle. Pour lui, c’est un voyage ardu et douloureux,
mais profondément transformateur.
Pour Platon, c’est le passage d’un monde dominé par les sens vers un monde
intelligible.
Pour un homme qui découvre la vraie foi, je dirai qu’il entre petit à petit
dans un nouvel univers qui le transforme de l’intérieur. Et Dieu
progressivement lui ouvre les yeux sur sa réalité qui est la vérité. La
révélation se fera pas à pas. Dieu l’enseignera sur ce nouveau chemin en
détruisant toutes les vérités qu’il s’était fait avec les ombres. Mais sa
progression nécessitera qu’ils se maintiennent toujours dans un niveau
d’humilité afin de voir juste et qu’il se lave régulièrement de tout péché.
A ce moment-là, le prisonnier libéré se
rend compte que les ombres dans la grotte ne sont pas la réalité, mais de
simples illusions.
Dans son désir de partager cette
révélation, il retourne dans la grotte pour libérer les autres.
Cependant, à son retour, il rencontre
une résistance et est incompris par ceux qui sont encore enchaînés.
Pour eux (les prisonniers), ce qu’ils ont compris des ombres restent la
seule réalité valable. Et la proposition d’une réalité différente est
inconcevable et menaçante. Elle menace surtout leur orgueil. Ils se croyaient
sages à leurs yeux. Pour moi, ils ont fait de ces ombres une parole divine, un
dogme, un credo.
Pour le philosophe, ce retour met en lumière la difficulté de transmettre
et d’accepter la vérité dans un monde habitué aux illusions, c’est un reflet de
la résistance humaine au changement et c’est un reflet de la non acceptation de
nouvelles vérités.
C’est vrai aussi, mais la cause essentielle n’est-elle pas ailleurs ?
La cause est beaucoup plus profonde.
Car pour nous disciples de Christ, nous savons que la vérité est synonyme
de jugement. C’est un combat spirituel intense.
« Et ce jugement c'est que, la lumière
étant venue dans le monde, les hommes ont préféré les ténèbres à la lumière,
parce que leurs œuvres étaient mauvaises. »(Jean 3 :19). Arrivé ici nous sommes
au cœur même du sens profond de l’allégorie de la caverne.
Le philosophe souligne la difficulté à guider les autres vers la lumière de
la connaissance supérieure. Pour un disciple cela va plus loin qu’une simple
incompréhension et qu’une simple résistance. C’est un choix délibéré que de rejeter
la lumière. Interpréter des ombres sur un mur et en tirer une opinion ne font
que conforter ceux qui persévèrent dans leurs mauvaises pensées et leurs
mauvais agissements.
Donc comme Christ, nous n’avons pas à éduqué et à enseigner de force en voulant
à tout prix libérer des prisonniers qui ne veulent pas être libéré. Ils
s’accommodent très bien de leur situation. « Celui qui ne croit pas est déjà jugé » (Jean 3 :18)
Le philosophe, comme le prisonnier libéré, comme le religieux aussi, se sent animer par
la responsabilité de guider les autres vers la lumière de la connaissance,
quitte à affronter l'incompréhension et la résistance. Le terme
« évangéliser » est approprié à tous.
Parce qu’en fin de compte, ils nous invitent tous (prisonniers, philosophes,
religieux) à remettre en question notre propre perception de la réalité. Ils
reconnaissent l’importance de rechercher la connaissance au-delà des
apparences.
Mais, pour un vrai croyant, la quête de connaissance est vaine. Notre vraie
quête nous place face à un défi supérieur, bien différent de celui de briser
nos propres chaînes et de sortir de nos grottes personnelles pour aller à la
recherche d’une compréhension plus profonde et plus vraie du monde. Ce défi est
fondamental puisque il répond à un BESOIN, une soif d’une nouvelle vie plutôt
que d’une nouvelle compréhension. C’est pourquoi, pour moi, celui qui brise ses
chaines et qui sort de sa caverne c’est celui qui découvre la Vie (avec un V
majuscule). Christ est la vie et la vérité. C’est lui qui nous rend libre. La connaissance ne fera que nous
enchainer à nouveau, ailleurs dans une autre grotte. Nous aurons toujours à
cœur d’interpréter ce que nous percevons pour en faire une vérité.
Mais je
n’ai pas terminé avec l’allégorie de la caverne. Car au final, les prisonniers de la caverne ont la ferme décision de faire mourir leur ancien
compagnon.
Ce dernier
acte, montre parfaitement non pas leur résistance au changement, au progrès à
la connaissance nouvelle, mais il montre l’état mauvais de leur cœur. Ce n’est
pas leurs préjugés, qu’ils ont besoin d’éliminer, mais leur esprit arrogant,
fourbe, menteur et criminel. C’est leur nature pécheresse qu’ils doivent
sacrifier sur l’autel.
« Ils n'ont ni savoir ni intelligence, Ils marchent dans les
ténèbres; Tous les fondements de la terre sont ébranlés. »
(Psaumes 82 :5)
Alors cette
allégorie de la caverne dévoile celui qui marche dans les ténèbres, c’est
l’arrogant, le soi-disant croyant, c’est celui qui place la connaissance au
sommet. La révélation ne peut en aucun cas être pour lui. Pourquoi ?
« La révélation de tes paroles
éclaire, Elle donne de l'intelligence aux simples. »(Psaumes 119 :130)
Les simples ont une âme d’enfants, ils
reçoivent la révélation.
Alors, je sais que des chrétiens s’arrêteront
aux premières lignes de ce message en s’insurgeant de ce que je me joins aux
philosophes. Ils affirmeront que je fais de la philosophie et plus de la
théologie ! Ils s’arrêteront sur leur opinion qui voit la philosophie, comme
des fables ; et nous n’avons pas à nous laisser guider par ces fables.
D’abord,
je ne me suis pas laissé guider par elles. Ensuite, en lisant ce texte, j’ai
pensé aussi qu’il aurait pu être un songe, le songe d’un chrétien. Sans dire que Platon en est l’auteur, je suis
persuadé qu’un tel songe aurait été très bien reçu dans une assemblée
chrétienne. Et même mieux je suis sûr aussi qu’il aurait été interprété à la
façon philosophique, en montrant l’importance de la connaissance spirituelle
sur la connaissance humaine matérielle et subjective.
L’existence de ces deux
mondes doit faire réfléchir tout croyant. Il doit ouvrir les yeux pour savoir
s’il est encore prisonnier de sa caverne ou bien s’il est vraiment libre en
Christ. La réponse ne coule pas forcément de source.
Pour
Platon apparemment, il était toujours dans sa caverne. Voilà une de ses
citations célèbre : « L’homme n’est
qu’un jouet inventé par Dieu ». Eh bien, si nous étions juste un jouet
pour Dieu, ce Dieu serait cruel comme le chat qui joue avec la souris avant de
la tuer. Mais un Dieu sauveur ne joue pas avec sa créature. Son respect et son
abnégation et même son sacrifice pour elle, fait de sa créature son meilleur ami,
ou sa future épouse.
Par
conséquent, considérons que la caverne de Platon doit-être revisitée par la foi.
Et la
question des philosophes est la même pour un chrétien : Sommes-nous
toujours influencés par des chimères, par des opinions formulées comme des
vérités toujours apprises, ou sommes-nous dans une connaissance qui nous amène
toujours plus à nous connaitre et à faire grandir notre âme ?
Parce que
l’aveuglement est sur chacun au départ. Les prisonniers de la caverne se
croyaient dans la lumière. Ils pensaient que l’extérieur était ténèbres. C’est
ce que croit aussi la très grande majorité de l’humanité. Se croire libre alors
que ses pensées et son âme sont en prison.
Rappelons-nous
que l’allégorie de la caverne montre un jugement. Il montre l’état de notre
âme. S’est-elle attachée à une foi emmurée par la connaissance (une
connaissance sombre et rigide comme ces ombres sur le mur) ? Ou bien notre
âme est-elle libérée du péché, est-elle abreuvée par une connaissance divine ?
« La
sagesse d'en haut est premièrement pure, ensuite pacifique, modérée,
conciliante, pleine de miséricorde et de bons fruits, exempte de duplicité,
d'hypocrisie. ».
Que cette connaissance-là en fin de compte soit l'objet de nos pensées. C’est
le fruit de la justice semé dans la paix nous dit l’épître de Jacques.
Amen
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