479
Par Eric Ruiz
De nos jours le croyant attend de son mouvement religieux qu’il fasse comme sous la loi de Moise, qu’il lui prescrive tout ce qu’il a à faire, alors que tout devrait provenir de l’Esprit Saint.
Je suis stupéfait de constater la multitude de techniques posturales dans les religions. Pour le baptême, il faut se placer comme cela ; pour la prière ; il faut être dans cette position-là ; pour bénir les gens, il faut imposer les mains de telle manière ; pour se rendre à l’Église, il faut être vêtu avec ces habits-là….Et le pire, c’est que chaque réforme a apporté ses nouvelles postures, comme plus vraies, plus pures que les anciennes.
La posture, c’est quoi ?
Dans les faits, c’est une position du corps ou une attitude particulière que nous adoptons à l’occasion de moments précis. Elle fait appel à des techniques corporelles enseignées, comme aussi à une manière d’être, de se comporter habituellement.
Et comme le disait Tertullien, théologien du 3ème siècle : « Les habitudes sans la vérité sont des erreurs qui ont vieilli ».
C‘est notre nature déchue qui cherche à s’organiser et en fin de compte à
nous adapter au monde.
Car
Christ n’a jamais évoqué une nouvelle loi visant de nouvelles postures, comme de
nouvelles habitudes.
La posture de la prière par exemple, c’est sans doute encore une erreur qui
a vieilli.
La prière véhicule une image puritaine quasi universelle, celle :
d’une posture à genoux, le dos courbé, les mains jointes, les yeux fermés. Et
cette posture est identifiée comme étant une attitude « fortement spirituelle ».
Une posture charnelle serait par opposition, dans le fait d’entrer dans un bâtiment d’église sans enlever son chapeau ou en parlant fort pendant que d’autres prient.
Or, discerner une posture charnelle d’une
posture spirituelle ne se fait pas toujours aussi facilement.
Cela demande de laisser de côté tous les préjugés populaires qui sont
devenus de véritables doxa.
L’opinion publique a cette habitude d’asseoir ses idées sur le paraitre plutôt que sur la vérité.
L’impiété est facile à voir lorsqu’une personne convoite ouvertement et
sans retenue une autre personne ou un objet particulier.
Mais dans les
assemblées, les rites sont là, plus pour masquer les véritables intentions, que
par souci de plaire à Dieu.
Une personne qui vient prier souvent dans le bâtiment d’église passe pour
être un pratiquant fidèle.
L’est-elle forcément ? Rien n’est moins sûr ; Sa « sainte
posture » peut trahir d’autres intentions. On peut venir prier avec un
cœur hautain, rempli d’arrogance et de haine en retenant les péchés d’une
personne, par le refus de lui pardonner.
Les actes ritualisés servent très souvent (trop souvent) à cacher une posture charnelle.
Pour un catholique, venir à la messe avec un missel à la main est perçu
comme une attitude juste. Pour un protestant, c’est la Bible qu’il aura pris
systématiquement pour le culte du dimanche, qui lui donnera du crédit aux yeux
des autres.
Ce qui est regrettable, c’est que ces deux postures-là font figure de jugement. Un
chrétien venant sans son livre saint sera vite catalogué de tiède, d’incrédule
et même de païen.
La culture religieuse passe avant le vrai culte, voilà la vérité.
Le voile par exemple, qui est un signe de respect et de soumission de la
femme par rapport à l’homme est une pratique régulière chez certains croyants.
C’est même une pratique obligatoire dans certaines assemblées.
Cette dévotion au premier regard montre un respect. Ce respect est tout à
l’honneur de la personne qui en fait usage.
Mais l’intention est-elle juste ? Car une fois le voile retiré,
comment la personne se comporte-t-elle en société ? Quelle relation
a-t-elle avec son entourage masculin ?
Ces questions sont fondamentales pour se rapprocher de la vérité.
C’est pour cela, que nous ne devons pas être prompts à juger d’une posture.
Car comme je le disais dans d’autres messages, l’intention prime sur la démonstration.
C’est l’intention qui souille la posture.
Jésus-Christ le démontre sans cesse dans ses rencontres et ses paroles.
Lorsqu’il évoque les faux Christ et les faux prophètes dans leurs beaux habits propres et nettoyés qui font des prodiges et des miracles, il montre que cette posture est souillée parce qu’elle cache l’intention de nuire par la séduction. Ils ont cette fausse piété, parce qu’ils sont intérieurement, remplis d'ossements de morts et de toute espèce d'impuretés. Ils paraissent justes aux yeux des hommes, mais, au dedans, ils sont pleins d'hypocrisie et d'iniquité.
Je discutais récemment avec un frère Congolais
qui me disait : « Je refuse que les gens s’agenouillent devant
moi pour que je prie pour eux. Je leur dis que je ne suis pas Dieu, mais un des
leurs (car je fais référence à Apocalypse 22 :8).
Je leur dit alors de s’asseoir sur une chaise ou de se mettre debout pour la prière. Et ce frère me demandait, si sa position était juste.».
Loin de le juger, je dis simplement, qu’il est très facile de tomber dans le dogmatisme, qui est de voir un verset comme un principe divin et ne plus en déroger. C’est ce que font habituellement les courants religieux et c’est ce qu’ils enseignent.
Et, Apocalypse 22 :8-9 peut justement servir si facilement à instaurer une doxa chrétienne : « Et quand j'eus entendu et vu, je tombai aux pieds de l'ange qui me les montrait, pour l'adorer. 9Mais il me dit: Garde-toi de le faire! Je suis ton compagnon de service…Adore Dieu ».
Tomber
aux pieds de l’ange c’est évidemment s’agenouiller ou se prosterner.
Dans un premier temps, il est tout à fait
juste de juger la posture de s’agenouiller comme une intention de soumission.
Et nous n’avons pas, c’est vrai, à adorer n’importe quelle créature vivante ou
morte en nous agenouillant ou en nous prosternant devant elle.
Et même plus, nous n’avons pas à nous soumettre à la volonté d’une autre personne, encore moins d’un autre esprit que celui de notre Seigneur Jésus-Christ. Il n’y a pas de supériorité ni d’infériorité dans le corps de Christ.
Mais là aussi, ne jugeons pas la posture. C’est l’intention qui est première. Si l’humilité est l’unique mobile de l’acte, il n’y a pas de mal à s’abaisser physiquement.
Je vais prendre un exemple dans un contexte
complètement différent, un contexte historique fort.
Un évènement clés de notre Histoire nationale.
Le roi des francs Clovis, en se faisant baptiser à Reims, en abaissant son
front sous l’onction de l’évêque Rémi, montra moins une soumission au Christ,
qu’une proclamation de la victoire du catholicisme en France. L’intention fut
de voir davantage triompher une grande religion plutôt qu’une consécration
personnelle. La robe blanche symbole de pureté et de grâce qu’a revêtu Clovis à
la suite de son baptême avait un revers aux multiples stratégies politiques.
Et pour beaucoup d’historiens, la France est née à Noël 496, à partir de cette cérémonie : Une France catholique.
Pourquoi ai-je pris cet exemple ?
Parce qu’il sert surtout à mettre la lumière
sur la posture comme instrument de
pouvoir.
L’enjeu est la prise de pouvoir d’une
religion. La génuflexion ici, a servi et sert toujours à prêter allégeance
envers une religion.
Or, cette « posture sainte » ne devrait jamais servir des intérêts personnels religieux ou politiques, mais des intérêts altruistes (le besoin de l’autre qui devient mon besoin).
Détaillons cet intérêt altruiste :
Si j’ai mal agi envers mon frère en voulant
me rendre supérieur à lui, le fait de m’agenouiller aura pour sens de
m’humilier devant lui et de reconnaitre par mon humilité, la mauvaise posture
que j’avais auparavant à son égard.
M’abaisser visera à rétablir une juste attitude de cœur. Et j’irai dans le sens de l’apôtre Paul quand il exhorte ses frères Éphésiens, ainsi : « Soumettez-vous les uns aux autres dans la crainte de Christ ».
L’attitude juste est celle qui est en
cohérence avec un cœur transparent et aimant.
Toute tradition doit être inspirée par le cœur et ne déboucher sur aucune posture meilleure qu’une autre.
Paul dit aussi « que l’humilité vous fasse regarder les autres comme étant au-dessus de vous-mêmes. ».
Il ne s’agit pas ici d’adorer ou de vénérer les
autres, mais de rétablir une égalité juste.
En voyant l’autre supérieur à nous-même, nous nous mettons volontairement dans une position inférieure afin de rétablir une relation juste et égalitaire. C’est pour ainsi dire le rôle d’une balance. Les deux plateaux n’étant pas à l’équilibre, je rajoute ou j’enlève du poids. S’agenouiller signifie alors : délester, ou ôter la charge qui est trop lourde.
Or, si nous faisons une loi comme beaucoup de
religions de la Bible le font au sujet de la génuflexion, alors nous empêchons
le disciple de mettre le comble à son amour.
Car
toute volonté de rétablissement demande une liberté dans les actes.
Et Christ cherche à nous affranchir dans ce sens, afin que nous participions activement au rétablissement de la vérité. Que nous puissions exercer un amour fidèle et véritable, celui du fils ressuscité en nous.
Jésus ne nous a-t-il pas montré que laver les
pieds de ses disciples était bon et juste quand notre cœur veut pardonner les
fautes ?
Jésus s’est abaissé volontairement pour
montrer l’état de son cœur.
Son intention était moins dans la démonstration
d’un rite que dans l’expression d’aimer.
Il souhaitait une habitude de cœur plutôt qu’une coutume à respecter par dévotion.
Que fait Christ avec nos intentions qui ne sont pas bonnes ? Les
laisse-t-il indéfiniment semer l’ivraie partout ?
Voilà ce qu’il fait :
Matthieu 23 :12 : « Quiconque s'élèvera sera abaissé,
et quiconque s'abaissera sera élevé ».
Ce qu’il dit il le fera, Jésus rétablira lui-même ce qui
est juste, et de cette manière-là : « Le plus grand
parmi vous sera votre serviteur » verset 11.
Jésus inverse
les situations fausses. Il vient écraser la posture et la doxa fausses et
impures qui consiste à s’élever soi-même.
Il commence par la montrer :
-ils disent et ne font pas,
-ils posent des fardeaux très lourds sur les autres,
-ils aiment être vu de leurs actes,
-ils ont des vêtements pour se démarquer,
-ils aiment les premières places,
-ils aiment être reconnu,
-ils cherchent à être appelé par un nom supérieur.
Avant de changer les choses, Jésus montre les mauvaises postures, il prévient, il avertit ceux qui ont de mauvaises intentions.
Puis, Christ vient glorifier non pas celui qui a la bonne posture mais celui qui s’abaisse volontairement, en cherchant le bien de l’autre en premier.
Maintenant, combien de croyants ont été envoyés en enfer par leurs frères
simplement parce qu’on leur reprochait d’utiliser des symboles païens.
Je vais être direct, mais nombreuses et même incalculables sont les choses et les
postures chez les chrétiens qui ont des origines païennes.
Mais la question est : le fait de les accepter (consciemment ou inconsciemment) fait-il de nous des païens ?
Si nous pensons que les choses et les postures ont leur importance, c’est
que nous refusons de prendre en compte l’intention de chacun.
Comment pouvons-nous alors être serviteur de Christ ?
Celle ou celui qui passe son temps à juger les postures et les habitudes
des uns et des autres, se juge lui-même et se condamne lui-même, parce qu’il
met des lois difficiles à porter (qu’il ne porte pas lui-même) et qu’il tient
par ce fait la grâce captive.
Il met des liens là où il n’y avait rien. Il met des chaînes là où la liberté de l’esprit s’exerçait.
Il aurait mieux valu pour cette personne qu’elle ne connaisse pas les dons de Dieu.
Le voile du temple s’est déchiré à la mort de Jésus. Le sens de ce phénomène miraculeux met un point final aux services du temple, comme il se faisait autrefois. Le temple n’est plus à l’extérieur mais à l’intérieur de l’homme. Les vêtements sacerdotaux, n’ont plus usage. Tout ce qui se montrait extérieurement par les prêtres se fait maintenant par l’intérieur, avec le cœur.
Par conséquent, revenir aux rites anciens, ceux d’Aaron avec ses postures et ses obligations ne fait que de se replacer sous une loi de malédiction. Christ nous a libérés de la malédiction, pourquoi alors y retourner ?
Alors soyons intègre, ne jugeons pas les habitudes des autres. Regardons comme Dieu regarde, au cœur. Les circoncis de la chair ne sont pas forcément circoncis de cœur. Pourtant, c’est ce dernier rituel que Dieu aime. Cette habitude cachée, voilée mais qui se révèle lorsqu’un proche est dans la difficulté ou la souffrance.
2023, ne sera pas une année de tout repos à ce sujet, et les occasions
d’aider son prochain seront bien plus nombreuses qu’avant.
Amen
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire