dimanche 10 octobre 2021

LE « JE, JE SUIS» de DIEU

 403


Par Eric Ruiz

 

Jésus ne prononçait que très rarement le pronom personnel « je » pour dire je suis comme cela. J’ai envie de cela. Je désir cela.

Il disait plutôt, lorsqu’il parlait d’une mission ou d’un évènement futur : le « fils de l’homme ».

Comme si cette personne n’était pas lui dans la chair, comme si c’était quelqu’un d’autre ou bien une particularité générale.

Dans les quatre Évangiles : Jésus d’ailleurs  pose la question de son identité à ses disciples : « Qui dites-vous que je suis ? »

Et la réponse, n’est pas anodine lorsque Simon Pierre répond : Tu es le Christ, le fils du Dieu vivant, le oint de Dieu.

Que voulait-il nous montrer par-là, le fils de Dieu ?

D’abord que le «  je » n’est pas ce qu’il est lui, puisqu’il montre la personne, l’égo, son moi, donc soi-même. Et que Jésus ne montrait pas sa personne, ni sa personnalité propre.

Il s’effaçait au profit d’une autre,  puisqu’il ne faisait donc pas sa volonté mais celle de son Père, (« celui qui m’a vu a vu le Père » Jean 14 : 9).

Jésus montrait le Dieu invisible qui l’avait envoyé, missionné dans un corps humain.

 

-        Donc le « je, je suis » de Jésus montre sa mission et non sa personne.

 

La preuve : il disait : « je ne suis pas venu appeler des justes mais des pécheurs ( la mission auprès de tous les hommes)je suis le pain de vie (la mission de nourrir l’esprit, l’âme et le corps)…Je ne suis venu non pour abolir, mais pour accomplir (la mission de la grâce) là où deux ou trois sont assemblés je suis au milieu d’eux (la mission de chef de l’Église)…écoutez ce que je dis… pour bâtir sa maison sur le roc (la mission d’enseigner la vérité) … Je suis venu dans ce monde pour un jugement (la mission de juger, discerner où est le mal)…ou encore, « je suis venu jeter un feu sur la terre et qu’ai-je à désirer s’il est déjà allumé ( la mission de révéler le règne du mal qui est déjà là)  je suis la résurrection, la vie (la mission de vaincre la mort), je suis la porte, si quelqu’un entre par moi, il sera sauvé (la mission du salut):

« Je, je suis » : c’est la mission

Lorsque nous renaissons spirituellement ne recevons-nous pas nous aussi une mission, un sacerdoce par l’onction?

Enseignez-leur à observer tous ceux que je vous ai prescrit » Matthieu 28 :20 ; c’est la mission du disciple.

Et cette mission ne nous pousse-t-elle pas à ne plus nous investir en tant que « je, je suis», en tant que personne, mais en tant que « nous, nous-sommes» : moi et le Saint-Esprit.

Moi et le Saint-Esprit nous enseignerons à observer tout ce qu’il nous a prescrit.

Oui, mais il y a une limite cependant… ce « nous, nous sommes » doit disparaître pour ne plus être qu’un, dans un « je, je suis » où l’Esprit ne fait plus qu’un avec le nôtre.

Et à ce moment nous sommes des serviteurs comme notre Père et Jésus le sont « moi, je suis au milieu de vous comme celui qui sert » (Luc 22 :27).

Attention à l’erreur commune : cette fonction de serviteur n’est pas un préambule à celui de maître.

On ne devient pas serviteur puis maître.  Un maître qui cesserait d’être serviteur parce qu’il a acquis un niveau spirituel supérieur.

 

-        Mais le maître, le je suis, se voit dans le service.

 

Il est passé maître dans son service pour Dieu, dans sa mission.

Sans le Saint-Esprit, je regarde encore à la comparaison et je ne suis motivé qu’à devenir maître en dépassant celui de serviteur.

Or serviteur est la plus belle fonction de Dieu. En servant les autres je me sers moi-même. C’est comme cela que Dieu est ; et c’est comme cela qu’on devient un disciple accompli.

Jésus lavant les pieds de ses disciples, montrait le point d’honneur à son amour. Sa fonction de serviteur.

Cette fonction, je devrais dire sa pratique est d’autant plus importante qu’elle montre le menteur, le traire, celui qui se refuse à être le serviteur des autres, bien qu’il s’en vante.

C’est ainsi, en servant les autres que nous savons que notre « je » est pluriel, comme Élohim, un autre nom de Dieu lui aussi pluriel.

Et même si nous sommes seuls nous savons que nous vivons dans un corps composé d’âmes multiples.

Pourtant chose paradoxale, Dieu se fait appelé « Je suis ».

Alors, est-il finalement centré sur lui-même ? S’aime-t-il lui seul ?

Exode 3:13-15

"Moïse dit à Dieu: J'irai donc vers les enfants d'Israël, et je leur dirai: Le Dieu de vos pères m'envoie vers vous. Mais, s'ils me demandent quel est son nom, que leur répondrai-je? Dieu dit à Moïse: Je suis celui qui est. Et il ajouta: C'est ainsi que tu répondras aux enfants d'Israël: Celui qui s'appelle "je suis" m'a envoyé vers vous. …Voilà mon nom pour l'éternité, voilà mon nom de génération en génération."

Donc en apparence « Je suis » semble marquer une réalité divine permanente et supérieure.

Mais là aussi s’arrêter à la contradiction sans chercher plus loin, c’est ne pas vouloir mettre la lumière en hauteur pour qu’elle éclaire la pièce entière.

Le « Je suis » de Dieu n’est pas un je suis exclusif mais un je suis inclusif. Dieu inclut sa création en lui.

Dieu a fait placer le tabernacle au milieu des 12 tribus d’Israël. Il ne s’est pas placé à l’extérieure d’elles.

Une des meilleures preuves se trouve aussi dans ce que Jésus dit : » Ne crois-tu pas que je suis dans le Père, et que le Père est en moi? » (Jean 14 :10).

L’inclusion est totale, fusionnelle même.

C’est-à-dire que le regard divin n’est pas porté directement sur lui-même.


-        Son regard se porte sur lui quand il se porte sur nous.

 

Dieu veut se voir en nous, comme nous-mêmes nous nous voyons dans les autres.

Quand je me regarde, je vois mon corps, ma tête, mes membres, etc.

Quand Dieu se regarde, il voit son corps, ses membres : ceux qui l’adorent en esprit et en vérité, parce qu’ils font sa volonté.

Et Dieu se voit en bonne santé, avec ceux qui l’adorent en vérité, mais il se voit aussi malade, accablé, abandonné, méprisé, persécuté, mourant, avec ceux qui l’adorent qu’en paroles mais dont le cœur s’est éloigné de lui.

Le mal, le mensonge l’accablent, l’idolâtrie le répugne et la tiédeur le fait vomir.

S’il était toujours en excellente santé, Dieu n’aurait pas besoin d’être sauveur.

Il se contemplerait et ordonnerait à un peuple d’être entièrement à son service et de l’admirer et de l’ovationner sans cesse.

Mais Dieu « je suis » est tout autre. C’est un Dieu amour ; mais un Dieu qui s’aime à travers les autres. Un Dieu qui évolue par la souffrance (la sienne et celle des autres), par le renoncement, par le sacrifice, par l’abnégation.

Le « Je suis » divin  est à l’opposé même de l’égo humain qui ne rêve que de lumière comme Lucifer. Cet être déchu qui rêve de porter sa lumière le plus haut possible.

Je suis celui qui est, ce Dieu c’est : j’existe dans un état d’amour, de souffrance, de renoncement et de sacrifice permanent.

Oui le fardeau est léger pour celui qui fait sa volonté, mais s’il devient lourd ce n’est pas que Dieu a changé d’avis ou qu’il nous a oublié c’est plutôt l’inverse alors. Quand il se regarde, il ne se voit plus ; il ne voit plus le « je suis » qu’il est.

Posons-nous la question que regarde Dieu quand il se regarde, donc quand il nous regarde ?

Exode 25 :8 : « Il me feront un Sanctuaire et j’habiterai au milieu d’eux ».

Dieu regarde le sanctuaire, celui qui est au centre de notre être.

Comment est notre Temple ?

Un lieu de piété et d’humilité ou un lieu de marchandage, où l’on pèse ses sacrifices pour en connaître la valeur et après étalage de sa piété, on la vend au plus offrant ? (un peu comme si on se vendait à l’assemblée soi-disant la meilleure)

Bien souvent Dieu n’a pas besoin de rentrer si profond en nous pour y sonder et y découvrir notre sanctification.

« à l'entrée de la tente d'assignation, devant l'Éternel: c'est là que je me rencontrerai avec vous, et que je te parlerai ». 

S’il se rencontre avec nous, c’est bien qu’il se regarde là, à l’entrée de la tente du tabernacle.  Il regarde si son « je suis » est le même que notre « je suis ».

Il voit ce que nous avons mis sur l’autel, ce que nous avons vraiment sacrifier pour lui.

Il voit si notre offrande est agréé ou mauvaise, de la même manière qu’il a jugé celle d’Abel et de Caïn.

Il voit si nos actes ont vraiment suivi nos paroles et si notre piété n’est pas un écran de fumé, cachant une bien fausse humilité.

Et là devant l’entrée du tabernacle Dieu regarde son corps et le trouve bien souvent sale, répugnant, dégageant une odeur nauséabonde.

Dieu regarde l’homme aujourd’hui comme il l’a toujours regardé (hier et éternellement). Toujours devant la porte de son cœur, rien n’a changé.

A Adam Dieu lui demanda pourquoi il se cachait dans le jardin? De quoi  avait-il peur? et pourquoi cachait-il son cœur ?

Aujourd’hui cette question reste la même pour beaucoup de croyants.

Qu’ont-ils à cacher ?

Peut-être : Je suis malhonnête avec mon Dieu, je refuse la vérité en face.

J’en ai déjà parlé : «  je suis » c’est le Dieu invariable ; celui qui place un présent permanent. Tout ce qu’il avait comme projet, comme tout ce qu’il a prévu est inclus dans le présent.

Il n’a pas changé avec le temps et il ne changera pas. Lui, sa parole, son esprit est oui est amen, c’est un état présent intemporel. Un jour est comme mille ans pour lui. Et il n’est pas enfermé dans un espace où règne le jour et la nuit.

Alors, il a tout prévu pour un corps glorifié, mais aussi, pour un corps maltraité, humilié, souffrant et pour finir mourant.

Dieu a prévu de sauver son corps par son esprit de consolation, Christ. Il sait que la maltraitance l’amènera à l’humilité, sa nature même. Il sait que la résurrection de son fils sera le remède à la mort et portera beaucoup de fruits. La gloire est à ce prix.

Notre prière se résume donc dans le fait de demander que notre « je » humain devienne le « je » divin, celui qui nous fait partagé sa gloire en prenant notre place dans son corps.

La mission de Jésus se voyait clairement, la nôtre doit faire de même. Sommes-nous capable de dire :

« Les paroles que je vous dis, je ne les dis pas de moi-même; et le Père qui demeure en moi, c'est lui qui fait les œuvres » ? (Jean 14 :10 )

Car si nous avons le Saint-Esprit, c’est que nous avons obligatoirement aussi le Père.

Cette grâce, Moïse l’avait aussi,  Dieu lui avait comme nous aujourd’hui, donné rendez-vous « C'est là que je me rencontrerai avec toi; du haut du propitiatoire, entre les deux chérubins placés sur l'arche du témoignage, je te donnerai tous mes ordres pour les enfants d'Israël » (Exode 25 :22).

Alors, soyons attentif à la voix de notre Seigneur qui nous parle dans notre cœur dans ce lieu très saint, entre ces deux chérubins. C’est là que notre foi grandie et que notre unité prend forme et que nous pouvons recevoir ce même nom divin : « Je suis ».

Amen

dimanche 3 octobre 2021

L’ÉGLISE RENAISSANTE

402


Par Eric Ruiz

 

On ne quitte pas un groupe religieux, une assemblée parce qu’on n’est pas d’accord avec elle ou avec les idées qui s’y proclament.

Ce n’est pas être d’accord ou pas d’accord envers des opinions qu’il s’agit. On n’est pas justement au sein d’un parti politique avec d’un côté des militants conquis et de l’autre des contestataires près à trahir ;

Si on agit ainsi, si on agit sur les idées, on agit par conviction intellectuelle, mais pas du tout selon la foi et l’Esprit saint.


-        LE CORPS MYSTIQUE DE CHRIST

Le corps mystique de Christ  dépasse largement l’individu, la personne, son identité terrestre et par conséquent sa propre vision des choses.

Car nos pensées ne font que de nous délier, pour nous enchaîner ailleurs ; elles ne nous libèrent pas vraiment.

Or, on est dans le corps de Christ qui lorsqu’il reprend vie, réclame ses droits célestes.

Le Saint-Esprit a un autre mobile que le désaccord :

Et ce mobile se dévoile dans le livre des Chroniques : 2 Chroniques 11 :13-14 « Les sacrificateurs et les Lévites qui se trouvaient dans tout Israël quittèrent leurs demeures pour se rendre auprès de lui (Roboam); car les Lévites abandonnèrent leurs banlieues et leurs propriétés et vinrent en Juda et à Jérusalem, parce que Jéroboam et ses fils les empêchèrent de remplir leurs fonctions comme sacrificateurs de l'Éternel. »

Le premier roi d’Israël après le schisme, Jéroboam 1er et ses fils, avaient choisi d’autres sacrificateurs que les lévites pour faire le sacrifice.

Donc les sacrificateurs étaient inactifs, ils perdaient courage. Leur foi ne servait plus à rien.

Voilà la vraie raison de quitter une assemblée: c’est parce que là où l’on se trouve il n’est plus possible à l’Esprit saint de s’exprimer par soi.

C’est le besoin de l’Esprit qui pousse à l’action, qui pousse à partir, qui pousse à quitter un lieu pour un autre.

Et ce n’est pas un esprit humain plus intelligent qu’un autre, plus instruit, avec un QI supérieur qui le peut. La vérité n’est pas en accord avec l’intelligence humaine.

« Je détruirai la sagesse des sages, Et j'anéantirai l'intelligence des intelligents. 20Où est le sage? où est le scribe? où est le disputeur de ce siècle? Dieu n'a-t-il pas convaincu de folie la sagesse du monde? »

L’esprit de Dieu est bien au-delà de nos compréhensions humaines… « La vérité est autre chose que l’opinion ».

Mais Dieu n’est-il pas venu habiter parmi nous, en nous ?

Cet esprit, c’est cette parole pleine de grâce et de vérité qui est venue faire sa demeure en nous (Jean 1 :14)

Un homme soi-disant sage et intelligent est sans qu’il le sache, dans une prison.

«  un homme intelligent et fier de son intelligence ressemble à un condamné qui serait fier d’avoir une grande cellule »  ( « La personne et le sacré » p51 Simone Weil)

Et je ne parle pas du langage, qui cherche des opinions et qui alors n’est que bien peu de chose dans l’expression de l’Esprit. Les pensées de l’Esprit vont bien plus loin.

On ne peut réduire l’Esprit Saint à la parole parlée, celle qui sort de la bouche, comme on l’entend trop souvent dans les assemblées chrétiennes.

L’Esprit naît d’abord dans un être nouveau qui est passé par le brisement et la repentance.

Les pensées de l’Esprit sont d’ailleurs très près de celui qui est passé très proche de son anéantissement, après avoir séjourné longtemps dans un état extrême et totale d’humiliation, comme le fut notre Seigneur Jésus-Christ à la fin de sa vie terrestre.

Un croyant vrai, attend,  calmement dans les tribulations, au milieu de l’épreuve « il attend selon la promesse de Dieu, un nouveau ciel et une nouvelle terre ».

Le ciel, c’est l’esprit de Dieu qui sort d’un être nouveau, d‘un être humain né d’en haut. L’esprit exprime alors un souffle nouveau, une énergie différente, des expressions multiples et variées provenant de Dieu.

 

-        L’ÉNERGIE DE DIEU

 

Considérons l’énergie divine :

Je le constate, personnellement quand je me lève le matin et que je suis encore pris par le sommeil, et qu’il me faudrait du temps après un bon café pour reprendre mes esprits et exprimer des mots intelligibles.

Or, je prends mon ordinateur et une énergie me traverse, une énergie qui vient d’ailleurs et qui me permet d’être efficace seulement pour les choses de l’esprit ; car je reste encore dans une brume matinale très forte et ceux qui m’entourent savent qu’une autre activité m’est alors très pénible, voire même impossible.

« Si le grain ne meurt … il reste seul». Si le grain ne meurt, il ne peut renaître et porter du fruit.

Et Jésus rajoute ces trois petits mots « il reste seul », il est abandonné à lui-même. Isolé, dans la solitude, il meurt seul.

Porter du fruit demande donc de mourir. 

Mourir à soi-même oui, mais aussi comme mourir d’inaction.

L’état d’énergie de Dieu demande au préalable une inaction, une inactivité, une espèce de léthargie permanente

Nous sommes alors comme une eau stagnante, qui n’est plus renouvelée par le courant.

Nous sommes alors, comme les ouvriers de la dernière heure qui mouraient d’inactivité et qui se sont  d’un seul coup, remobiliser pour travailler à la vigne de Dieu.

Mais l’énergie de ce grain qui porte du fruit, n’a pas qu’un seul sens de circulation. Cette énergie circule encore différemment.

Jésus de Nazareth a senti une force, une énergie le quitter au moment où une personne atteinte d’une maladie grave touchait son vêtement. L’énergie est venue donner la vie, à la mort.

Cette énergie nous permet alors de vaincre la mort d’une âme desséchée. Et c’est d’abord notre propre âme desséchée en premier lieu.

Par exemple, l’énergie permettra de n’être plus sourds aux cris muets, plus sourds aux souffrances dissimulés des personnes tourmentées, brisées et malheureuses que nous rencontrons. Cette énergie : c’est l’énergie de la compassion.

 

-        LA COMPASSION INCARNÉE

 

Il y a une compassion que nous ne pouvons atteindre ni par le langage, ni par la relation aux autres ou par les sentiments.

Et Jésus-Christ nous a montré que, lui, pouvait dépasser ce seuil, ce niveau d’amour ; Pas parce qu’il se mettait dans un état de pouvoir le recevoir (on n’est pas du tout dans une forme de méditation hindouiste), mais parce que l’énergie venant du Père le lui permettait.

Seule l’opération surnaturelle de la grâce amène à pouvoir entrer dans une telle énergie.

Jésus ému de compassion, guérissait les malades. Jésus ému de compassion nourrit la foule languissante et affamée. Jésus ému de compassion aima le jeune homme riche qui se confiait plus en ses richesses qu’en Dieu.

Ces différentes actions d’amour vont plus loin que d’éprouver de la pitié ou de l’attention ;

Revenons à cette écrivaine philosophe des années d’entre-deux guerres : Simone Weil.

Savez-vous que sa soif de vérité, sa compassion pour les déshérités l’a amené à quitter son emploi de professeur d’université pour aller travaillé en usine ?...pas une semaine, non, plus d’un an. Elle n’a pas été interviewée les ouvriers sur leur misérable conditions de travail, non, elle a préféré juger par elle-même en se mettant dans la peau d’un ouvrier des années 30.

Elle a connu le dur travail à la chaine, la faim, la fatigue, les cadences infernales d’un travail épuisant physiquement et moralement, le chômage partiel aussi qui l’a amené à vivre la précarité (des journées à 5 francs en poche).

Mieux qu’un stage, une incarnation ; Rien de mieux et de plus réel que de vivre la même situation que ces ouvriers pour mesurer leur souffrance, leur oppression, leur combat… d’autant plus qu’elle ira au bout de ses forces en s’arrêtant d’y travailler à cause de sa santé, qui deviendra défaillante.

Elle a en cherchant la vérité fait comme Dieu, elle s’est incarnée dans une nouvelle situation.

Dieu, lui, a souffert l’humiliation en s’incarnant par son fils Jésus ; il a souffert jusqu’à l’abandon total, pour terminer à la croix.

Dieu connait le sens de ce qu’abandonner signifie. Le Père n’a pas sauvé son Fils de l’agonie menant à la mort.

Jésus souffrant sur la croix a crié « Père, pourquoi m’a tu abandonné ? ».

Dieu, sait pour l’avoir vécu par son fils ce que vos cris de détresse signifient, alors. Votre déchirement est son déchirement alors.

En toute logique, la compassion de Dieu, se transmet d’abord parce que nous vivons ou avons vécus de semblables souffrances… mais aussi, sa compassion se transmet par notre fidélité. 

À celui ou à celle qui lui est fidèle, Dieu s’immisce au centre de sa communion, par un état intérieur qui  lui permet alors d’être au même niveau que le malheureux.

Compatir : c’est alors vivre ce que l’autre éprouve ce qu’il éprouve dans son for intérieur, comme si on était lui. Et on devient lui, réellement. On est incarné.

Notre âme s’associe à la sienne.

En ce sens, la compassion divine est un mystère pour ceux qui ne le vivent pas. Parce qu’il n’y a qu’en esprit et en vérité que nous pouvons le vivre. J’ai bien dit vivre et pas ressentir.

Parce que l’esprit de Dieu nous fait vivre un état intérieur qui n’a rien à voir avec des sentiments, avec des ressentis. Cela tient du prodige.

Et cela ne vient pas de nous, cela vient du ciel, d’en haut.

L’attention que l’on porte à l’autre  n’a alors qu’un seul désir : le secourir, lui venir en aide. Parce qu’à ce moment-là, en lui portant secours, on se porte secours à soi-même.

On est prêt à faire couler son propre sang, à faire comme Jésus, perdre de la force si c’est le prix de la guérison de l’autre.

 

-        PORTER SECOURS

 

Voilà la fonction d’un sacrificateur de Dieu. Voilà cette fonction que l’on a enlevée aux sacrificateurs qui étaient en Israël au temps du roi Jéroboam 1er : Porter secours.

Ils l’ont quitté pour une bonne raison, pour porter secours ailleurs. Pour exercer ce qu’ils sont au plus profond d’eux-mêmes, des briseurs de chaînes. Ils ouvrent la prison des prisonniers et ils libèrent les oubliés, les captifs, comme eux-mêmes ont été délivrés.

Car cet esprit nouveau, ce ciel nouveau doit aussi s’exprimer ailleurs, sur « une nouvelle terre » ; 

Rappelons-nous que les sacrificateurs quittèrent leurs maisons partout en Israël pour aller vers Juda et Jérusalem.

Ils ont quitté une assemblée pour une autre. Ils ont laissé une ancienne terre pour une nouvelle terre.

L’esprit pousse à agir ailleurs, mais pas toujours avec des mots. Il n’y a pas forcément une parole formulée clairement qui nous le dit comme un prophète le dirai « va ailleurs, où je te dirai, j’ai une mission pour toi » ;

Mais il y a, c’est certain, une conviction. On est persuadé que c’est la bonne solution, la seule solution ; et d’ailleurs les évènements vont tous dans ce sens. Les moyens arrivent de partout.

La parole qui est devenue conviction agit alors là aussi comme une énergie qui nous pousse à partir ; et le plan s’élabore de lui-même. Pas besoin de préméditation. Le moment a été choisi par l’Esprit.

 

-        MOURIR POUR RENAITRE

 

C’est un peu comme une personne qui sent en elle que son heure, sa dernière heure est arrivée. Personne, aucune voix ne lui a dictée sa fin. Elle a simplement la certitude qu’elle va aller ailleurs, quitter ce monde ; Qu’il est temps à son esprit et à son âme de quitter son corps.

Car toute renaissance commence par la mort. Rappelez-vous : « Si le grain ne meurt »…

Toute résurrection commence par quitter un ancien ciel, une ancienne terre pour de nouveaux cieux et une nouvelle terre.

Être sacrificateur de Dieu suppose d’exercer sa fonction sacerdotale.

Laquelle ?

 

-        SANCTIFIER LE NOM DE DIEU

 

La prière que Jésus enseigne : « Que ton nom soit sanctifié »

Le nom de Dieu n’est-ce pas celui de sauveur ?

Nous sanctifions, nous mettons à part son nom, lorsque nous sommes sauvés, délivrés ; et après lorsque libérés, nous portons secours au malheureux.

Soigner la brebis blessée, la mettre hors de danger, veiller sur sa sécurité physique et morale, l’encourager, compatir avec elle dans ses souffrances, c’est le berger qui a une telle présence. Et cette présence je le rappelle sanctifie le nom de Dieu (Sauveur).

Et Dieu, lui, sanctifie ses fils en les associant à son nom.

Ils deviennent alors, berger eux-mêmes, pasteurs en ayant non pas le titre mais la fonction.

Alors comment ne pas finir sur la prophétie de Michée qui nous montre l’Église renaissante :

Michée 4 :6-7

« En ce jour-là, dit l’Éternel, je recueillerai les boiteux, Je rassemblerai ceux qui étaient chassés, Ceux que j'avais maltraités.
Des boiteux je ferai un reste, De ceux qui étaient chassés une nation puissante; Et l’Éternel régnera sur eux, à la montagne de Sion, Dès lors et pour toujours 
».

Amen

dimanche 26 septembre 2021

L’ÉGLISE, UN PARTI POLITIQUE ?

 401


Par Eric Ruiz


« Prenez garde au levain des Pharisiens et au levain d’Hérode ».

En relisant ce verset de l’Évangile de Marc chapitre 8, je m’aperçois que décidément la religion a toujours fait bon ménage avec la politique.


Les Pharisiens, d’un côté, avec leur grand mouvement religieux de l’époque de Jésus dans lequel Paul de tarse est sorti… et de l’autre côté, le roi romain Hérode, roi du Judée qui fait figure de puissance politique ; Tous deux possèdent  le même levain, la même pâte qui se lève parce qu’elle est faite d’hypocrisie, d’orgueil et de mensonge.

Avec le levain, que remarque-t-on ? Le pain gonfle; il se voit de plus loin, Il fait plus vraiIl est plus beau, il attire, il donne envieAvec ce levain, le politique cherche à séduire, à se faire voir, il parait beau parce qu’il semble rempli de paroles de vérité.

Pour le croyant religieux, c’est la même chose que le politique. Mais creusons un peu plus.

Et posons-nous la question si depuis  le 9 décembre 1905 (date de la loi sur la séparation entre l’Église et l’État en France), la religion est-elle si bien séparée que cela de la politique ?

Je vous pose cette question parce que je suis tombé à l’improviste sur un livre, une petite note de Simone Weil, d’une trentaine de pages (qui s’écrit avec un W, une femme philosophe à ne pas confondre avec la femme politique qui a été à l’origine de la dépénalisation de l’avortement) ;

et donc cette femme, philosophe française, juive d’origine, qui se tournera vers Christ, très courageuse a vu ses écrits publiés en 1950 après sa mort.

 Ce petit livre : « Note sur la suppression générale des partis politiques », fait figure d’une véritable bombe contre les partis politiques, mais il devrait aussi s’adresser aux gens d’Église tellement la similitude est grande.

D’ailleurs, elle écrit, je cite : «  il n’y a pas grande différence entre l’attachement à un parti et l’attachement à une Église ».

 (En parlant d’Église, je pense, et je pense que vous ferez comme moi une différence entre foi chrétienne et foi en Christ)

Donc, c’est une bombe que Simone Weil amène avec son analyse des partis politiques. Elle regarde quelles sont leurs matériaux de construction et comment se fait cette construction qui amène inévitablement au totalitarisme.

 

1-      LA PRESSION SUR LES PENSEES : premier matériau

 

Si on regarde le cheminement des idées dans un parti politique, il s’exerce une véritable pression collective sur la pensée de chacun de ses membres. Cette pression est le ciment, ce qui solidifie le parti.

Si on s’en tenait juste au fait que ses membres partagent les mêmes opinions et les mêmes valeurs, il n’y aurait, certes, rien d’inquiétant.

Là où l’inquiétude gagne, c’est que les idées sont contrôlées. Le pluralisme est banni.

Ils ont imaginé « la doctrine » de ce qui est bien du bien public.

Le pluralisme, quant à lui, serait d’accepter des idées divergentes de la fameuse doctrine du parti, d’accepter des idées contradictoires.

Or, dans les faits, aucune idée qui diverge de la doctrine du parti ne doit être prononcée.  On doit prendre parti pour ou contre, un point c’est tout ; mais ne pas laisser s’exprimer d’idées contradictoires qui ferai prendre le risque d’affaiblir le parti, de prendre le risque de créer de la division.

Si bien qu’adhérer à un parti politique c’est renoncé à exprimer une idée contradictoire, c’est renoncer à l’exercice de la raison critique. Car la raison critique menace de fragiliser la stabilité du parti.

Simone Weil emploi des mots très forts sur les partis politiques en ce sens, qu’il porte en eux le germe du totalitarisme.

Et l’Église, (pas celle de Christ) celle que l’on connait, celle que l’on fréquente ou que l’on a connu n’a-t-elle pas elle aussi ce germe ?

Tout comme les partis politiques l’Église des nations, n’accepte aucun pluralisme, aucune idée divergente par rapport au dogme établi.

-        Jésus guérissant les malades, le jour du Sabbat, sa nouvelle doctrine c’est vue rejeter comme celle d’un démon, par les pharisiens.

On ne discute pas avec un démon, point.

Si vous ne laissez pas vos désaccords au vestiaire, vous montrez votre dissidence, votre désobéissance à l’autorité, comme dans un parti.

Le danger pour le parti, c’est que cette dissidence gagne d’autres membres du groupe et quelle provoque des scissions, des clans qui viendront rompre l’unité.

Les conséquences sont terribles pour la liberté de penser.

En prenant une position «  pour » ou « contre » une opinion, en cherchant des arguments selon le cas, soit pour, soit contre, on crée les conditions de la pensée mécanique, c’est-à-dire la non pensée.

Pour Simone Weil, l’esprit de parti fait sacrifier la pensée sur l’autel du consensus, elle fait passer les intérêts du groupe avant la vérité.

Les assemblées chrétiennes qui éloignent toutes pensées autres, font passer elles aussi les intérêts du groupe avant la vérité.

Or, la foi ne supporte pas le mensonge. C’est ce que nous dit Jésus, dans Jean 4 :23 :

 « les vrais adorateurs adoreront le Père en esprit et en vérité ».

Et si la vérité n’est plus recherchée par chacun comme un assoiffé, eh bien adorer Dieu revient à l’adorer sans l’esprit et sans la vérité ; c’est donc être un faux adorateur du Père.

Parce qu’avec un tel sacrifice, la vérité est sacrifiée sur l’autel des intérêts.

Notre écrivaine juive dit une chose très juste d’ailleurs sur la recherche de la vérité : « C’est en désirant la vérité à vide et sans tenter d’en deviner d’avance le contenu qu’on reçoit la lumière ».

Arrêtons, c’est vrai, un instant de nous référer à nos crédos, à nos Bibles, à nos recueils savants et venons à la vérité, « à vide », comme un enfant, ouvert à ce qui vient de l’extérieur.

Le désaccord, c’est quelque chose de positif qui ferait évoluer même la doctrine d’un parti. Mais pour le parti comme pour le groupement religieux, le désaccord rompt cette doctrine et l’idée divergente sera perçue comme une déloyauté, comme le germe de la trahison.

Dans les faits, la pensée du groupe se substitue et écrase même la pensée individuelle.

On n’attend ni du militant politique ni du croyant qu’il exprime des idées, mais qu’il soutienne les idées, les idées du parti, comme celles de son mouvement clérical.

Maintenant, les esprits totalitaires évoqueront toujours ce qui les faits trembler : la trahison.

D’ailleurs cette trahison fait réfléchir sérieusement sur nos choix.

Car un choix s’impose : celui d’être fidèle à la ligne du parti, aux principes et aux dogmes de son groupe religieux ou bien au choix d’être fidèle à ses pensées.

Si on suit sa pensée, on reste fidèle à soi-même, mais on trahit le parti ou le groupe religieux. Et si on suit le parti on lui reste fidèle, mais c’est soi-même qu’on trahi. Et dans le cas d’un croyant, c’est l’esprit saint qu’il trahi alors, s’il trahit sa pensée.

Donc dans les deux cas il y a trahison.

Et le dilemme du militant (et j’ajouterai, comme celui du croyant qui dans un Église devient lui aussi un militant) c’est un dilemme d’ordre moral, c’est choisir qui trahir.

Et tôt ou tard le membre du parti (comme le membre d’une Église aussi) sera confronté à ce dilemme. Et ce jour-là il devra trahir, trahir le parti, trahir son groupe ou se trahir lui-même.

Beaucoup choisiront, on le sait, puisqu’on le voit à grande échelle, de se trahir soi-même en politique comme dans la foi. 

Et les conséquences sont terribles d’abord pour soi-même, car la honte nous envahit à ce moment-là, la honte d’avoir choisi les pensées de cette génération (qui est adultère et pécheresse) plutôt que d’avoir choisi les paroles venant de l’Esprit saint et qui divergent de la doxa ecclésiale.

Par exemple : Si vous adhérer à votre groupe religieux, qui proclame haut et fort qu’il porte en lui les élus de Dieu, et si votre lumière intérieure vous dit qu’ils sont aussi et surtout ailleurs, vous trahissez votre âme.

Et regardez ce que dit Jésus pour ceux qui trahissent leur âme…

« Que donnerait un homme en échange de son âme? (dit Jésus) Car quiconque aura honte de moi et de mes paroles au milieu de cette génération adultère et pécheresse, le Fils de l'homme aura aussi honte de lui, quand il viendra dans la gloire de son Père, avec les saints anges. »(Marc 8 :37-38).

 La honte n’est pas dans le fait de se taire, la honte est dans le fait de trahir son âme.

Beaucoup sont près à vendre leur âme au parti politique ou à leur groupe religieux en se soumettant à leur parti pris, en se soumettant à la pression de leur pensée, à leur mensonge.

Passons maintenant à un autre matériau qu’évoque Simone Weil :

 

2-     LA RECHERCHE DE LA CROISSANCE ABSOLUE.

 

Un parti politique n’est pas un club de réflexion.

Un parti politique comme l’assemblée religieuse cherche avant tout à faire avancer ses idées, à les promouvoir. Par la propagande pour les premiers, par l’évangélisation pour les deuxièmes.

Le parti politique n’a pas d’autres fins que sa croissance, et pour cela il doit faire taire les voix dissidentes quand bien même elles seraient du côté de la vérité.

 En fait, « dès lors que la croissance du parti devient l’unique but du parti (et par association celui des Églises) , il s’en suit inévitablement une pression collective sur les pensées des hommes. Cette pression se voit dans les faits, elle s’étale publiquement nous dit l’écrivaine. Elle est avouée, proclamée ».

Dans les Églises par exemple, la soif de croissance pousse les prédicateurs à exercer une pression qui va jusqu’à l’oppression sur la pensée de leurs fidèles, pour qu’ils ne discutent pas, mais qu’ils persuadent ; donc le choix des mots sert l’Église mais pas la vérité.

Il faut se rendre à l’évidence, et Simone Weil a raison de dire que les idées ne triomphent pas parce qu’elles sont vraies, les idées triomphent parce que la force est de leur côté (la force de persuasion).

Donc le parti politique, le groupe religieux ne se donne pas le choix : il doit gagner en force d’adhésion, concrètement il doit grossir. Le but de l’un et de l’autre c’est la croissance illimitée. Le camp politique, comme l’étiquette religieuse est alors très fort et très discriminant. Et tout ce qui n’est pas lui représente une menace envers son pouvoir.

Il y a une citation connue qui affirme que « toute personne qui n’est pas moi est mon adversaire ».

Donc, il faut bien comprendre que le but du parti, comme celui du groupe de foi n’est plus d’instaurer un bien commun mais le but a été confondu avec les moyens, puisque le moyen :  « croître indéfiniment » est devenu le but.

D’un côté le slogan est : faites des adhérents, de l’autre : le slogan c’est faites des disciples.

Le but, nous dit Simone Weil, n’est plus d’instaurer le bien au sein du parti, le parti devient le bien lui-même.

Le parti politique, le groupe de foi devient lui-même sa propre fin.

ça va très loin puisque tout ce qui va contribuer à favoriser la croissance du groupe est un bien, même le mensonge, y compris la compromission.

L’intérêt général du parti comme l’intérêt général du groupe religieux est nettement supérieur à la vérité.

Simone Weil va même par écrire : « Si on confiait au diable l’organisation de la vie publique, il ne pourrait rien imaginer de plus ingénieux ».

Le bien est changé en mal. « Malheur à ceux qui appelle le mal bien et le bien, mal » (Esaïe 5 :20)

J’en reviens à la pression collective sur la pensée : Dire la vérité revient alors à trahir les intérêts du parti, ou ceux de l’Église, elle fait perdre des voix, des collectes, des adhérents, des fidèles.

Mais c’est quoi cette vérité ?

La nôtre. C’est quand nous restons fidèle à cette part de « lumière intérieure » ; c’est elle cette lumière, ce discernement qui nous empêche de mentir, nous dit l’écrivaine.

Être loyal vis-à-vis du parti ou de son assemblée c’est donc : être déloyal vis-à-vis de la vérité.

Et même si on ne connait pas toutes les lois du parti l’essentiel est d’y adhérer et de s’y soumettre par principe.

Car le grand but n’est pas d’avoir raison, le but c’est de convaincre d’avoir raison.

Pour conclure, je dirai qu’il y a bien un conflit d’intérêt entre ses propres pensées perçues comme justes ou vraies et l’attachement à un parti, ou l’attachement à une Église qui sacrifie la vérité pour le pouvoir.

Simone Weil définit le mensonge ainsi : le mensonge naît dans « les pensées de ceux qui ne désirent pas la vérité ».

Jésus dit, lui, qu’ils ont préféré les ténèbres à la lumière.

Ce qui m’amène à évoquer avec elle, l’écrivaine juive, un autre matériau de construction, c’est :

 

3-     LA PASSION COLLECTIVE.

 

L’apôtre Paul recommande à Timothée de fuir les passions de la jeunesse. : » Fuis les passions de la jeunesse, et recherche la justice, la foi, la charité, la paix, avec ceux qui invoquent le Seigneur d'un cœur pur. » ;

Aux Galates, Paul leur montre que ceux qui sont à Christ ont « crucifier la chair avec ses passions  et ses désirs.»

Jacques dit que demander mal c’est demander dans le but de satisfaire ses passions. (Jacques 4 :3).

Simone Weil n’emploie, bien sûr, pas ses mots dans ce contexte, mais regardez ce qu’elle démontre :

Le parti politique cherche à attiser les passions collectives. Pourquoi ?

Parce que le pouvoir ne se construit pas sur de la vérité mais sur de la croyance, il se construit sur de la passion.

Quand des partisans se basent sur leurs passions, ils font confiance à leurs émotions, à leur sensibilité, ils ne font plus appel à leur raison.

Et la passion devient l’instrument principal de manipulation des partis.

« Les partis politiques sont des machines à fabriquer de la passion collective ».

C’est leur carburant, ils puisent leur énergie dans la passion collective, car cette énergie va tout simplement les amener au pouvoir.

Comment ? par la propagande, (et dans l’Église, par l’évangélisation).

Cette énergie, il faut le répéter ne s’appuie pas sur la raison. Elle pousse à l’idolâtrie, au fanatisme au crime en bande organisées.

Cette énergie, (et là c’est moi qui parle), est le carburant principal aussi des groupes religieux.

Faire monter les passions, les émotions autour de pensées émanant d’un discours, d’un sermon, ou autour d’un acte surnaturel, ou autour de prophéties, tout cela annihile la raison.

Alors, les principes du bien sont oubliés en cours de route, au profit du résultat (la croissance du groupe).

Je ne dis pas comme Simone Weil de supprimer ou de rompre avec tout regroupement religieux comme avec tout parti politique.

Je dis qu’il est indispensable de fuir les passions, de ne plus rechercher les émotions collectives. Mais de se réunir fraternellement en cherchant le bien commun, en déliant les langues pour que les pensées s’expriment. La vérité de l’Esprit saint doit être entendue. La pensée exprimée et débattue est la base de la communion fraternelle.

Enfin, bannissons le mal, bannissons cette intention satanique de rechercher le pouvoir et la croissance de son groupe.

Ne cherchons pas à nous agrandir, à faire des disciples. Mais laissons l’Esprit saint faire lui-même ses choix, et laissons les Juda, s’il y en a, s’exprimer dans l’assemblée.

Car, c’est seulement à ce prix que le levain d’Hérode, ou l’esprit de parti  fuira loin de vous. C’est seulement à ce prix que nous pourrons chasser le mal et éloigner cette tentation de la passion.

L’ennemi n’est pas l’Église institution avec sa volonté de pouvoir ; l’ennemi : c’est la tentation de trahir sa pensée, celle qui vient de Christ.

Les seules idées qui triompheront dans le corps de Christ seront celles émises par des frères et sœurs libérées des matériaux des partis ou des Églises organisées.

En fuyant la passion collective, nous fuirons l’idolâtrie, c’est le combat d’un sacrificateur de Dieu.

Jésus nous a bien dit de nous garder du levain, mais pas de nous garder des institutions ou de les anéantir. Soyons remplis de sagesse et de justice dans nos choix.

Ne donnons pas l’occasion au mal de grandir par nous : Favoriser la non pensée, vouloir plus d’adeptes et nourrir la passion collective ne sont pas les matériaux du Saint-Esprit mais ceux de l’esprit totalitaire, du diable.

Amen