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Par Eric Ruiz
Le chrétien aujourd’hui, n’a pas les mêmes
réactions que le disciple du temps des apôtres.
Qui me fait être si affirmatif ?
Ce qui me fait dire cela, c’est d’abord que les premiers disciples n’avaient pas tous les écrits d’Esaïe avec eux, et encore moins les autres anciens livres de la Bible ; et aussi, que les Évangiles n’étaient pas encore écrits. Quant aux apôtres, ils ne passaient pas leur temps avec les croyants, en restant là disponible pour répondre à toutes leurs questions.
Comment faisaient-ils alors pour s’édifier ? Comment faisaient-ils pour trouver des réponses lorsque la peur, l’angoisse les saisissait ?
De nos jours la Bible est présente dans tous les
foyers chrétiens. La réaction est donc de se tourner vers sa Bible pour méditer.
D’ailleurs, on trouve facilement toute une
liste de versets à lire et à méditer pour de multiples cas. Qui n’a pas ses
versets clés qu’il relit lorsqu’il est dans la peur et la crainte ? Qui
n’a pas ses versets pour être dans la joie ? Ceux pour être béni ? Ceux
encore pour être guéri, etc ?
Ne sommes-nous pas étourdis avec toute cette connaissance aussi merveilleuse soit elle ?
Nous devons rétablir ce qui est vrai.
Je devrais en choquer plus d’un au passage, mais lire la Bible, la méditer ne sert à rien dans ces cas-là. Pourquoi ?
Parce qu’on trouvera toujours des versets
pour s’apaiser momentanément. Mais cette paix ne sera que provisoire.
C’est comme si on mettait un petit pansement sur une grande plaie, où l’hémorragie nécessiterait plutôt d’ôter les corps étrangers, d’abord, de désinfecter abondamment, ensuite, avant de faire plusieurs points de suture.
Alors que faire ?
Les premiers disciples, eux, mettaient en pratique ce que l’Esprit Saint leur montrait. Il ne leur montrait pas une connaissance nouvelle. Il leur montrait leur péché tout simplement.
Parce qu’il n’y a que le péché qui met une
séparation entre nous et Dieu. Le péché,
c’est ce corps étranger qui est entré en nous et qui doit être ôté, sans quoi
tout le corps va s’infecter et sombrer dans la maladie.
Cette connaissance à elle seule suffit à
s’édifier.
Si nous avons péché, le réflexe tout simple, nous le connaissons, nous nous éloignons de lui après l’avoir confessé, sachant que Jésus-Christ nous purifie en retour.
Mais il y a aussi l’action. Les actes sont
notre témoignage et ils sont aussi importants que de voir son péché.
L’amour, nous le savons aussi couvre une multitude de péchés. Les premiers disciples le savaient sans qu’on le leur enseigne forcément ; et ils le pratiquaient.
Mais quand l’amour se refroidissait parmi plusieurs membres, alors les apôtres rappelaient ce que tous avaient exercé avec passion dans leur début. Ils exerçaient ce que l’apôtre Pierre nomme une « ardente charité » (1Pierre 4 :8)
En quoi consistait cette ardente
charité ?
A exercer l’hospitalité.
Ils s’accueillaient entre frères.
« (1Pierre 4 :9) Exercez l'hospitalité les uns envers les autres, sans murmures. ».
Pourtant l’hospitalité se fait envers
n’importe qui, croyants d’abord puis non croyants ensuite. Et, philoxenos en
grec, montre une grande générosité envers ceux que l’on accueil).
Mais Pierre rappelle et insiste sur une forme d’hospitalité particulière, ici.
Il ne s’agit pas seulement d’ouvrir sa porte
et d’offrir le gite et le couvert à des frères et sœurs ; mais aussi de le
faire à ceux qui n’ont pas forcément l’attitude que nous attendons d’eux.
Quand Pierre demande de le faire « sans murmures », sans
vous plaindre, dit la version Semeur, sans récriminer (ressentir du
mécontentement empreint d’amertume) dit la version Bible liturgique.
Pierre montre bien qu’il y a de la crainte,
une sorte de grognement sourd, de mécontentement caché derrière cette
hospitalité.
Une hospitalité qu’on dirait presque forcée. On
fronce les sourcils, on hausse les yeux, on parle à voix basse, dès que l’on
invoque certains frères ou certaines sœurs.
On n’a pas trop envie de les voir se pointer
devant le palier de notre porte.
Donc, l’hospitalité reste toujours une loi
dans le cœur de beaucoup. On l’exerce parce que c’est écrit dans la loi de Dieu,
dans la Bible.
Or, si le croyant se force à la pratiquer
pour se faire juste à ses yeux, la grâce qu’il a reçu de Christ est vaine, inutile.
Il se forcera à ouvrir sa porte espérant recevoir une bénédiction spéciale, une prospérité qui lui apportera une maison plus grande, une assemblée plus nombreuse.
J’en ai pour preuve que la prophétie d’Esaïe
54 s’est répandue dans le monde hébraïque comme aussi dans le monde chrétien.
Lisons-la :
« Les
fils de la délaissée seront plus nombreux…Elargis l'espace de ta tente; Qu'on
déploie les couvertures de ta demeure: Ne retiens pas! Allonge tes cordages, Et
affermis tes pieux!
3Car tu
te répandras à droite et à gauche; Ta postérité envahira des nations, Et
peuplera des villes désertes »
(Esaïe 54 :1-3)
Quel croyant ne souhaite pas faire partie de
cette grande famille de la foi, parce qu’il aura contribué à ouvrir la porte de
sa demeure à d’autres croyants?
(aujourd’hui, on a laissé cette hospitalité à
l’église, c’est plutôt ouvrir la porte du bâtiment de son église. Non le
contexte c’est bien notre chez soi dont il est question).
Les juifs ont cette réputation d’être hospitalier. En tous les cas c’est aussi l’image que nous renvoient d’autres peuples du monde.
Des païens l’exercent par tradition, ou pour conserver une bonne image d’eux-mêmes. D’autres le font aussi, mais avec certains groupe de personnes. Il y a des conditions pour exercer l’hospitalité. On ne peut le faire avec tous, ce serait aller au-devant des difficultés et parfois même, se mettre en danger.
Cette vision est la même chez beaucoup de chrétiens. Ils sont réticents parce qu’il y en a parmi eux qui sont peu aimables, c’est vrai, un peu casse-pieds, certains accaparants, d’autres bourrées de manies ; et ceux qui sont toujours à se plaindre, et ceux qui sont réputés pour se vanter sans cesse de leur bénédictions et d’autres encore qui abusent et profitent de la situation d’invité (les pique assiettes, les sans gènes, les culottés…). Et puis il y en a d’autres qui auraient un don, un enseignement à partager qui ne nous réjouis pas forcément.
Sommes-nous dans le monde pour y exercer leur mode de vie satanique ou sommes-nous dans le monde pour y faire régner Christ ? Et dans ce cas-là, répondre à notre prière : « Père que ton règne vienne » ?
Ne soyons donc pas dans le jugement pour trouver des conditions à notre accueil et pour refouler certains, en les retranchant de notre communion, sous prétexte que leur fréquentation ne nous emballe pas forcément.
Pierre dit : « que
chacun de vous mette au service des autres le don qu'il a reçu, ».
Pierre montre que le partage est bien au-dessus de nos valeurs. Et que ce que nous avons reçu par la grâce est bien supérieur à ce que nous montrons de notre personnalité.
L’hospitalier se doit d’agir « comme un bon dispensateur des
diverses grâces de Dieu » nous dit toujours la première épitre de
Pierre.
Le bon dispensateur dépasse tous ces petits inconvénients
pour ne se centrer que sur l’essentiel : le partage avec l’autre qui
l’édifie.
Les grâces de Dieu en notre faveur devraient nous montrer son infinie clémence
qui ne s’embarrasse pas de nos petites bizarreries ou de nos anomalies de
caractère.
Nous devons, dans les faits, dépasser nos idées sur l’accueil. Notre manière de penser ne doit pas être façonnée par ce que fait le monde, mais par le Saint-Esprit, qui met tous, petits et grands, fréquentables ou non fréquentables sur le même pied d’égalité.
Qui mérite d’être laissé sur le bord du chemin ?
Est-ce à nous disciple de le savoir ? Non, c’est à Christ de le gérer. Et
l’hospitalité qu’il nous propose est parfaite parce qu’elle est
inconditionnelle.
Car « si nous aimons seulement ceux qui nous
aiment » que
fait-on d’extraordinaire, les païens en font autant, et Jésus rajoute :
« les pécheurs aussi agissent de même » (Luc 6 :32).
Jésus termine sa pensée en affirmant : « Soyez donc miséricordieux, comme votre Père est miséricordieux ».
Alors, Dieu nous sonde, il examine nos intentions, il sonde
nos reins. Que fait-il dans la réalité avec ces organes particuliers ?
Nos reins sont l’organe par excellence qui filtre les toxines et les déchets de l’organisme. Nous croyants, sommes invités à brûler, à détruire ce qui nous domine.
Donc Dieu pèse, évalue la valeur de notre
sacrifice par nos reins.
En clair, pour en revenir à l’accueil : si
nous sommes soumis à nos idées sur l’hospitalité, nous ne montrons que notre
soumission à la chair ; et nous
prouvons ainsi que nos reins ne sacrifient rien, qu’ils sont inutiles, qu’ils
ne fonctionnent pas.
Le rein c’est le baromètre de nos sacrifices et
de notre renoncement pour Dieu.
Si par motif d’intérêt personnel nous discriminons ceux que nous accueillons, où se trouve notre sacrifice ? (et l’accueil se fait de nos jours en priorité dans l’église)
Alors tournons nos regards vers ceux qui ont
besoin de nous, d’abord vers nos proches.
Renonçons à nos idées sur la bienveillance ou sur la bonté qui nous renvoie toujours sur les imperfections des autres et sur notre état forcément meilleur.
Certains ont trouvé un subterfuge avec une
forme de « garde alternée ». Ici, il ne s’agit pas d’une garde d’enfants,
mais d’une pratique un peu perverse.
La garde alternée consiste à ne pas se
séparer des indésirables pour ne pas ressentir de la culpabilité. Pour cela certains ont institué une forme
d’accueil provisoire chez les uns et chez les autres. On supporte les cas
difficiles par moment seulement (une fois par mois ou à certaines occasions
comme lors de fêtes).
C’est hélas encore là, agir comme dans le
monde.
Car notre paix ne reviendra qu’avec une affection
profonde manifestée pour les autres.
L’apôtre Pierre quand il prend le mot
philoxenos (traduit dans nos Bibles par hospitalité), parle d’avoir une grande
générosité envers ses hôtes. La relation est loin d’être superficielle et elle
n’attend rien de l’invité en retour.
Ce n’est pas juste ouvrir sa porte. Notre
attitude bienveillante serait bien plus importante encore.
Ne soyons pas tournés sans cesse vers nous-mêmes. Mais soyons conséquent et exerçons l’amour divin envers tous, sans condition.
D’autant que Christ nous demande d’aller plus
loin, de mettre le comble à notre amour.
Accepter l’hôte qui a un comportement pas
toujours simple, nous permet aussi de lui laver les pieds, comme Jésus la fait
à ses disciples.
C’est-à-dire, plus que d’exercer un rite, il s’agit de pardonner ses fautes, surtout si nous avons ressenti une offense de sa part. Et lui, par la même occasion constatant une offense de notre part, pourra faire de même, pardonner nos fautes.
Mettre le comble à son amour, c’est aussi
accueillir le casse-pied de la même façon que s’il était un hôte très important,
une sorte de prince d’Israël. Nous n’avons pas à lui faire la morale ou à lui
mettre des conditions comme : « si tu continues à te servir et à te resservir
sans cesse à table, tu ne reviendras plus partager le repas chez nous ».
Ce genre de réaction nous place comme étant
les seuls juges du mérite à accorder à l’accueil.
Laissons-le au contraire faire ce qu’il a à cœur de faire. Prions plutôt afin qu’il se rende compte que vous avez sacrifié votre repas et qu’il prive certains d’aliments.
C’est votre sacrifice ou ceux des autres qui doit
lui faire honte pour qu’il convertisse sa position.
Mais attention, ne tombons pas dans un autre
jugement qui consisterait à tout faire pour qu’il se rende compte de son
état ; ne provoquons rien de négatif ou d’implicite qui le rendrait
redevable envers nous, comme un petit pic du genre : « on voit bien
que c’est pas toi qui paye »
Sinon, nous rentrons dans le même jugement.
Et la pensée suivante est si commune : « C’est un égoïste qui ne
pense qu’à lui et à son ventre ».
Mais qui sait s’il n’a peut-être pas une boulimie liée à un manque affectif, ou un autre problème ?
Alors, si nous pouvons faire autre chose que
des pâtes jambon (c’est un exemple), mais agrémenter les plats le mieux
possible faisons-le, sans émettre de conditions et sans attendre de retours.
N’oublions pas ce que l’auteur de la lettre aux Hébreux nous
recommande fortement:
«.N'oubliez pas l'hospitalité; car, en l'exerçant, quelques-uns ont logé des anges, sans le savoir » (Hébreux 13:2)
Si nous savons que nous accueillons des anges
de Dieu, quelle serait notre réaction ?
Nous ne nous mettrions pas en quatre pour les
accueillir comme des princes ?
Christ ne nous demande pas de surestimer les autres, comme il ne nous demande pas de les sous-estimer non plus. Là aussi soyons sobres, modérés, tout en étant généreux dans nos relations.
Pour résumer :
Exercer l’hospitalité, même à grande échelle
ne nous libère pas forcément de nos peurs et de nos angoisses. Pourquoi ?
Parce que si l’hospitalité n’est pas réalisée
dans l’amour fraternel, elle ne sert à rien.
Dieu ne peut pardonner nos fautes parce que nous ne les pardonnons pas aux casse-pieds qui viennent nous visiter. Nous tenons rigueur de leur manque de savoir-vivre, nous les jugeons et nous attirons sur nous alors le même jugement, la même condamnation.
Par contre, un accueil fait sans condition,
sans attendre de bénédiction en retour, en mettant toute son énergie pour le
confort et le bonheur de nos hôtes, couvrira une multitude de péchés et nous
libéra bien mieux que de lire et méditer mille versets bibliques.
Amen
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