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Par Eric
RUIZ
Dans les assemblées chrétiennes, nombreuses sont celles qui étonnent par la joie, la ferveur et l’exaltation même, des croyants qui y sont. Ils se congratulent, ils ont tous le sourire. Leur enthousiasme déborde.
Mais,
cette apparence de bonheur est-elle réelle ? Montre-t-elle une foi
profonde ?
Car, de
nos jours la
vérité est prêchée à l’envers. Elle nous arrive à contre-sens.
Par
exemple on demande, on ordonne même au chrétien d’être joyeux, d’avoir le
sourire constamment aux lèvres pour soigner son témoignage.
Cela va
même plus loin, j’ai entendu un pasteur très réputé dire à son assemblée que
l’obéissance vient après la joie. Oui j’ai bien dit : l’obéissance viendrait après la joie !?...
On demande
en fait d’imiter le fruit de l’esprit. Le croyant doit faire en sorte de
montrer de la générosité, de l’amour pour son prochain, il doit se forcer à être patient. Il doit se
souvenir que son témoignage a de l’importance pour les autres.
La
première action à faire s’est alors d’exprimer un sentiment même s’il n’est pas
présent. Pourquoi ?
Parce
qu’il sera le déclencheur d’une émotion plus forte : l’enthousiasme par
exemple.
Celui ou
celle qui arrive à montrer cette joie, se voit alors congratuler par les
autres, et montrer en exemple.
Ses démonstrations
de louange sont alors pris pour de l’inspiration, comme si l’esprit saint lui
aurait incité à le faire, alors qu’il n’est en train que d’imiter ce que son pasteur
lui a demandé de manifester le plus souvent possible.
Il ne fait que d’obéir à un homme.
Oui, reconnaissons-le, dans beaucoup d’Églises, la joie est une obéissance aux commandements du prêcheur mais pas aux commandements de Dieu.
Attention, ce n’est pas fini. L’enseignant prêche que si vous avez cette foi-là, celle d’imiter la joie, comme les œuvres de l’esprit, cela vous donnera de la force pour obéir à Dieu et à ses commandements. Cela dynamisera votre obéissance.
Comme si la loi de Dieu était pénible. Et qu’il nous faille un remède pour mieux s’en approcher et que susciter la joie est ce remède.
Sans s’en apercevoir pour autant ces enseignants pensent que l’imitation de la vérité va provoquer la vérité. En forçant sa nature, on va aboutir à une nouvelle nature. En montrant un fruit avarié, on prétend que l’arbre est fertile.
Dans quel
but ses paroles d’un faux évangile sont-elles proclamées ?
Toujours dans le même but, celui d’attirer les foules.
Parce qu’une
assemblée qui devient morose, triste, sans entrain n’attire pas à elle de
nouveaux membres ; et elles ne fait que de décourager ceux qui sont encore
motivés.
Ce procédé
est bien connu des leaders en communication de groupe, puisque c’est une
technique pour dynamiser un groupe, lui redonner une énergie qu’il n’a
plus ; Et faire ensuite, qu’il soit plus performant dans ses affaires.
D’ailleurs toujours dans ces conventions de motivation, le chant est inscrit au programme, puisqu’il joue un rôle libérateur de la joie.
Dans les assemblées, la place laissée au chant est devenue majeure. Cette place est parfois beaucoup plus grande que le temps laissée à l’étude ou à l’écoute d’un message biblique.
Mais en agissant ainsi, on agit comme dans le monde païen. On cherche à partir d’une émotion à créer une énergie collective et à la maintenir au plus haut niveau.
C’est exactement ce qui se passe dans un stade de football par exemple. Pendant le match, le but marqué par un joueur va déclencher une émotion de joie intense qui se propagera à tous les spectateurs et qui au final donnera également une nouvelle énergie au public. Les chants des supporters là aussi permettront de garder cet enthousiasme collectif au plus haut.
Un mot est employé pour qualifier ce genre d’émotion : c’est se transcender. « Se dépasser en allant au-delà de ses possibilités ». On est allé au-dessus de soi-même.
Eh bien ce
nouvel élan s’appelle maintenant dans l’Église : la foi.
« Montrez-moi votre joie et je vous montrerai votre foi » : On en est là !
Or, la véritable foi n’est pas quand nous dépassons le niveau humain…Ne serait-elle pas précisément là où nous réalisons notre niveau humain, lorsque nous reconnaissons notre faiblesse ?
Reconnaitre
ses fautes, ses erreurs, ses actes manqués, une fois confessés, lavés cela
procurera une joie intense. Cette joie viendra alors sans qu’on l’ait provoquée
volontairement.
C’est la véritable louange ! C’est l’esprit de consolation, le Saint-Esprit qui provoque cette joie dans cette circonstance.
Pourquoi ?
Parce
qu’il nous délivre, il ôte un fardeau qui nous attristait.
Cette joie n’est pas
artificielle, elle correspond bien à un évènement douloureux qui n’existe plus.
Être délivré d’un fardeau mental oppressant a le même ressenti
que d’être délivré d’une lourde maladie.
Cette joie-là est identique et surtout
authentique.
Alors
bien-sûr, souvent un verset est là sorti de son contexte pour donner de la
crédibilité au discours :
« Soyez mes imitateurs, comme je le
suis moi-même de Christ. » (1 Corinthiens 11 :1)
Un verset bien connu des prédicateurs lorsqu’ils veulent
mettre la lumière sur eux.
Je traduis pour le prédicateur : « Soyez joyeux
comme je le suis moi-même de Christ » ou « Exercer la louange comme
je l’a tient moi-même de Christ ».
Encore un appui facile qui permet à toute l’assemblée de dire : « Amen », et d’imiter son enseignant en tout point jusqu’à l’idolâtrer.
Mais revenons-en au contexte. Paul ici, parle-t-il de la joie ? Parle-t-il du fruit de l’esprit ?
Il parle à une assemblée triste, c’est vrai, mais triste et désolante, parce que désobéissante en premier.
« 17ce que
je ne loue point, c'est que vous vous assemblez, non pour devenir meilleurs, mais
pour devenir pires…18 Et d'abord, j'apprends que, lorsque vous
vous réunissez en assemblée, il y a parmi vous des divisions…20méprisez-vous
l'Église de Dieu, et faites-vous honte à ceux qui n'ont rien?... 27celui
qui mangera le pain ou boira la coupe du Seigneur indignement, sera coupable
envers le corps et le sang du Seigneur. ».
L’apôtre Paul, comme il le dit au verset 17, donne un sérieux avertissement
à ses frères Corinthiens.
C’est
l’obéissance que cette assemblée doit imiter de Paul, et
pas ce qu’il fait ou ne fait pas, c’est petites manières ou sa bonne humeur.
Il n’est pas non plus en train de les exhorter à se réjouir
dans le Seigneur. Ce n’est pas une incitation à la louange, mais plutôt un
appel à cesser d’attrister l’esprit par leurs actes mauvais et démoniaques.
Il est obligé de leur demander d’arrêter de contester la place de chacun. Il rappelle qui est le chef parmi eux, Christ ; et ce qu’est la place de chacun, celle de l’homme mais aussi celle de la femme.
Alors pour en revenir à ce que dit Paul : « Soyez
mes imitateurs » ;
que veut-il bien dire ?
L’apôtre se place en modèle de fidélité. Et c’est cette fidélité que les Corinthiens doivent imiter chez Paul en arrêtant de tout contester.
D’ailleurs la coupure du chapitre est elle aussi mal
appropriée, puisque juste avant de dire « soyez mes imitateurs …»,
Paul écrivait au verset 33 du chapitre 10 : « de la
même manière que moi aussi je m'efforce en toutes choses de complaire à tous, cherchant,
non mon avantage, mais celui du plus grand nombre, afin qu'ils soient sauvés ».
Paul cherchait la justice de Dieu en fuyant les scandales et en regardant toujours au besoin des autres avant le sien.
Par conséquent prendre le verset de 1Corinthiens 11 :1 pour dire qu’il existe un commandement de Dieu ayant pour but d’imiter l’homme, et par voie de conséquences son caractère, est totalement sorti de son contexte. C’est une hérésie.
La joie comme tout autre signe d’humeur se doit être authentique. Ce qui signifie, qu’elle n’est pas créée, copiée, imitée, suscitée… Elle est la conséquence de quelque chose.
Le roi David dans ses Psaumes en avait bien conscience et
surtout, il savait à partir de quoi Dieu créait la joie, puisqu’il dit :
« Ceux qui sèment avec larmes moissonneront
avec chant de joie. »
(Psaume 126 :5).
La souffrance est partie essentielle de la joie. Au bout
d’un temps de douleur et de malheur, la libération procure la joie.
Donc,
celles et ceux qui ont sacrifié beaucoup pour le Seigneur récoltent
naturellement une joie parfaite.
Par contre ceux qui sacrifient pour leurs propres intérêts
ne récoltent que de l’aigreur et du ressentiment.
Les Corinthiens qu’exhortaient Paul en étaient là, et en plus, ils se jugeaient, se condamnaient les uns les autres.
La grande déviance aujourd’hui, est qu’un chrétien va
chercher sa joie dans un verset biblique.
Il sait que dans les Psaumes il trouvera ce qu’il cherche.
Par exemple : « Justes, réjouissez-vous en
l'Éternel et soyez dans l'allégresse! Poussez des cris de joie, vous tous qui
êtes droits de cœur! ».
Eh bien, le croyant se dit en lui-même : je suis
juste. C’est de moi que David parle aussi. Christ m’a justifié, alors je suis joyeux,
(en tous les cas, je dois l’être). Et voilà ce croyant qui se met en condition pour
susciter la joie en lui.
Ce verset, c’est un constat, un rappel aussi, pas (surtout
pas) un commandement.
Malgré cela, le chrétien se l’approprie comme tel, comme un
ordre. Il devrait continuer à se réjouir en le lisant, ou bien, s’il n’est pas
dans la joie, il devrait se poser la bonne question « Suis-je droit de
cœur ?... parce que je suis triste au fond de moi. Il y a quelque chose
d’anormale dans ma foi».
Le roi Salomon avait pris lui aussi conscience que simuler
la joie c’est une vanité, un orgueil démesuré.
Ecclésiaste 2 :1 « J'ai dit en mon cœur: Allons! Je
t'éprouverai par la joie, et tu goûteras le bonheur. Et voici, c'est encore là
une vanité. »
Salomon avait lui aussi créer artificiellement une fausse
joie en lui. Il en revenu. Il s’est vu alors exerçant lui aussi la vanité.
En fait, la plupart des Psaumes sont des prophéties, ce ne
sont pas des incitations à exercer la louange à tout va.
Psaume 5 :11 : « Tous
ceux qui se confient en toi se réjouiront, ils auront de l'allégresse à
toujours, et tu les protégeras; Tu seras un sujet de joie pour ceux qui aiment
ton nom ».
Ici, la joie est la conséquence normale d’un disciple,
d’une personne qui aime Dieu et qui ne fait rien sans lui.
Confesser : « je suis triste mais je mets ma joie
dans le Seigneur », c’est se mentir à soi-même.
Tout ce que je dis-là ne veut pas dire bien-sûr d’arrêter
de chanter des louanges à Dieu.
Non, mais il faut le faire avec un cœur bien disposé, sans
chercher à cacher sa tristesse derrière des paroles et une attitude faussement
joyeuse.
Je voudrais revenir sur la fidélité de Paul, cette fidélité
qu’il proposait aux Corinthiens d’imiter.
Jésus de Nazareth en a parlé dans une parabole.
« Tu as été fidèle en peu de choses, C’est bien bon et fidèle serviteur entre dans la joie de ton maitre » ;
Eh bien en finissant ainsi, Jésus nous montre que la fidélité jouit d’un salaire, celui de la joie,
de sa joie partagée avec nous.
Est-ce un hasard si le premier verset de la Bible qui parle
de la joie se trouve dans le livre du Lévitique et va dans ce sens ?
Lisons-le Lévitique 9 : 24
« La gloire de l'Éternel
apparut à tout le peuple. 24Le feu
sortit de devant l'Éternel, et consuma sur l'autel l'holocauste et les
graisses. Tout le peuple le vit; et ils poussèrent des cris de joie, et se
jetèrent sur leur face ».
Examinons le parcours qui amena cette
exultation collective chez les israélites.
La joie arriva à la suite d’un évènement majeur.
Moïse et Aaron ont fait d’abord ce que
l’Éternel leur avait ordonné, puis ils ont demandé à l’assemblée de faire de
même.
Vous voyez l’obéissance est venue en premier.
L’assemblée avait été prévenue : « s’ils obéissent, il verront la gloire de l’Éternel ».
Le sacrifice ainsi fait, il plut à Dieu, il
fut d’une agréable odeur et c’est le signe de son approbation (par le fait de consumer l’holocauste
et les graisses) qui suscita la joie
générale.
Rien n’a été sur joué ou provoqué
artificiellement.
Durant tout le protocole des sacrifices, la
mise en scène n’était pas théâtrale.
Aucune comédie n’était préparée. C’est la transparence d’un peuple et son
intégrité recherché qui a engendré
une joie juste et complète. C’est
cette joie-là le vrai pilier de la foi.
Amen
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