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Par Eric Ruiz
Non, je n’ai pas fait d’erreur dans mon titre.
Vous vous attendiez plutôt à :
Cette prière inspirée du « notre Père », je pense, est celle que
doit recevoir notre Seigneur le plus souvent. Mais est-t-elle vraiment perçue
par lui, ainsi ?
En d’autres mots :
Le cœur est-il en adéquation avec la bouche?
Je pense que bien souvent cette prière est annoncée avec l’intention
suivante :
« Seigneur exauce ma prière ! Que MA volonté
soit faite ! »
Nous savons que nous devons prier selon la volonté de notre Père pour être
exaucé. Mais dans quel sens doit-on prier ?
« Ne vous inquiétez de rien; mais en toute chose faites connaître
vos besoins à Dieu par des prières et des supplications, avec des actions de
grâces. » Philippiens 4:6
Cette prière de faire connaître nos besoins devrait être faite (comme elle
l’indique) dans la paix et la confiance. Or elle montre curieusement le plus
souvent une inquiétude, une préoccupation à la base.
C’est donc l’anxiété qui devient le mobile pour établir une liste de
requêtes, de vœux, de réclamations mêmes.
"Seigneur, j’ai besoin d’une voiture, Seigneur j’ai besoin d’un
travail, d’une compagne, d’une maison, d’argent, d’amour, d’une guérison,
...etc"
Cette liste de besoins figure-t-elle dans la volonté du Seigneur ?
Pas forcément.
J’ai un ami qui me disait il n’y a pas si longtemps, "je me sens un
peu coupable dans les prières que je fais à Dieu, car je n’ai pas envie de
prier autre chose que : ta volonté soit faite !"
Ce frère en Christ est-il réfractaire à l’effort, ou peu inspiré ou a-t ’il
tout simplement tort de prier ainsi?
Je pense qu’il n’a rien de tout cela et qu’il est sans doute plus dans la vérité,
que ceux qui manifestent des listes de prières à n’en plus finir. Prier pour
ses besoins de la sorte dévoilent plutôt un profond manque de foi.
Je pense que paradoxalement, plus notre prière est précise, qu’elle est détaillée
et orientée, eh bien plus elle montre un manque de foi et d’abandon dans le
Seigneur.
Aller, analysons la chose :
Notre prière ne ressemble-t-elle pas alors à un ordre que l’on donne à
Dieu? Un commandement qui le mettrait même en face de sa parole, confronté à
elle ?
Une sorte d’obligation et de devoir de sa part, pouvant même le faire
menteur en cas d’absence de réponse?
Par exemple :
« Tu as dit dans ta Parole que le juste ne manquerai de rien, alors
Seigneur merci de pourvoir à mon besoin d’argent ».
Qui n’a jamais formulé ou entendu dire cette sorte de prière ?
En apparence une belle prière de foi, en apparence seulement, mais en
profondeur cela ressemble plutôt à un commandement humain, un rappel à l’ordre,
un ultimatum, bref un manque total d’amour, de confiance et de foi bien-sûr
dans notre Seigneur.
Dieu n’a pas d’ordre à recevoir de quiconque.
Le vase n’a pas d’ordre à donner à son Potier.
Et pourtant combien de croyants semblent réclamer leur droit absolu à la
bénédiction divine.
Leur requête semble insinuer la chose suivante : « Comme je me suis
sacrifié pour toi, j’ai logiquement et selon les Écritures, droit à recevoir
une pluie abondante de bienfaits ».
Cela révèle une grande confusion :
A ce moment-là on confond deux sortes de foi :
La foi dans sa propre prière et la foi en Dieu.
Lorsqu’on a foi dans sa prière on manifeste la foi en soi. On augmente son
estime de soi, puisqu’on s’estime apte, saint, justifié;
Dans les faits :
premièrement, on croit que sa requête est inspirée puis dans un deuxième
temps on s’interdit de douter. On chasse toutes pensées de doute, les
assimilant à des pensées démoniaques (alors que c’est la chair qui ne fait que
s’exprimer ici ). Et troisièmement on confesse des paroles de remerciements, de
louange comme si notre requête était déjà là, présente, sous nos yeux et bien
réelle.
Et là on s’appuie sur le verset très connu et très utilisé d’Hébreux 11:1
« La foi est une ferme assurance des choses qu'on espère, une
démonstration de celles qu'on ne voit pas. »
Mais voilà le mensonge est tellement proche de la vérité que beaucoup s’y
laisse séduire. Et cela d’autant plus facilement, que notre chair avec ses
désirs hurlent sans cesse ses besoins.
Le verset d’Hébreux 11 s’adresse à des croyants régénérés et pas à des
croyants charnels.
La preuve : Paul s’appuie sur les exemples de la foi d’Abel, louant son
sacrifice, de la foi d’Enoch pour son enlèvement, de la foi de Noé saisie d’une
crainte respectueuse, ou celle encore d’Abraham qui partit sans savoir où il
allait.
En donnant tous ces exemples et bien d’autres, Paul insiste sur une foi
possédant une confiance aveugle, déterminée, prête à tout et allant même
jusqu’à subir des sévices terribles, des tortures menant à la mort, pour servir
leur Seigneur. Là aussi le sacrifice est lié complètement à la foi
Alors comment ne pas concevoir la foi différemment d’une simple requête?
La demande et la confession de foi prend alors une toute autre tournure.
Revenons au deux sortes de foi :
·
Dans le premier cas (celui des croyants charnels) le croyant visualise sa
requête.
Par exemple : il voit la voiture
qu’il a demandée au Seigneur et il a une ferme assurance d’obtenir la voiture
qu’il espère ; il en parle à tout le monde et il se voit même la
conduire ; l’image de lui assis derrière le volant est de plus en plus
nette.
C’est de la pensée positive, très en vogue avec le New-âge.
Cette prière pourra s’exaucée néanmoins, mais à travers des lois
spirituelles.
Rien ne dit que le Seigneur est derrière cela. Le résultat, c’est souvent
même une bénédiction humaine et non une bénédiction divine.
·
Dans le deuxième cas, le croyant s’attend sans rien voir, à l’intervention
de Dieu, il s’attend à l’inattendu, à l’imprévu.
Connaissant justement les voies insondables du Seigneur, il se force même à
ne rien imaginer, car la réponse qu’il va obtenir le surprendra bien souvent.
Il sera surpris du résultat, du moment, de la manière et de la tournure que
prendra son exaucement.
Sa foi ne s’attachera pas à l’objet mais
au sujet, c’est-à-dire non pas à ce qu’il a demandé, mais à la fidélité de Dieu
et à sa justification.
Dieu répondra favorablement quoiqu’il arrive et dans tous les cas.
Prenons l’exemple de l’apôtre Paul dans ses nombreux voyages, demandait-il
qu’on prie pour que Dieu ou que ses anges le garde?
Priait-il pour sa sécurité ? Pour que tout se passe dans le calme et la
sérénité ? Priait-il pour qu’il puisse avoir de nombreuses guérisons et
une multitude de miracles ?
Tout cela il faut le reconnaître fait partie des incontournables prières
« des saints » d’aujourd’hui, mais pas du tout des prières de nos
pères dans la foi.
Au chapitre 16 verset 6 des Actes on remarque bizarrement que Paul est même
empêché par le Saint-Esprit d’annoncer l’Evangile en Asie. Et c’est par une
vision qu’il se dirigera ailleurs.
Nous n’avons pas ici de démons qui s’opposent à lui, mais le Saint-Esprit.
Concrètement, comment le Saint-Esprit pouvait-il s’opposer à lui?
En lui mettant des embûches, des épreuves, des pièges, en laissant ses
ennemis l’attaquer et le persécuter.
Paul devait sans doute prier : « Père que ta volonté soit faite »,
c’est tout.
Pourquoi ?
Car il savait que de Jérusalem à Rome son chemin serait tortueux, semé
d’embûches, de problèmes en tous genres et de changements de dernières minutes.
Mais il savait qu’il se rendrait dans tous les cas à Rome.
Dans quel état ?
Par quels moyens ?
Dans combien de temps ?
Ces questions étaient pour lui hors de sens, ce n’était pas son souci.
Il remettait constamment son sort entre les mains du Seigneur qui décidait
de ses déplacements comme de ses combats, de ses souffrances et de ses
victoires.
Paul devait en fait prier dans le sens de recevoir de la force et
du courage, pour mener à bien sa mission, un point c’est tout.
Cette indice nous l’avons notamment au chapitre 23 des Actes verset 11,
puisqu’après que des soldats l’eurent emmené dans une forteresse pour qu’il ne
se fasse pas lyncher par une foule en colère contre lui, on peut lire que la
nuit suivante, le Seigneur apparu à Paul pour lui dire de prendre courage parce
qu’il devait rendre le même témoignage à Rome que celui qu’il a rendu à
Jérusalem.
Donc Paul qui avait dû prier pour être fortifié dans l’épreuve, fut sans
doute étonné par la réponse du Seigneur, lorsqu’un ange apparu dans le ciel
pour le fortifier de cette manière.
Autre exemple: Lorsque Paul écrit à l’Eglise de Colosse, nous apprenons
qu’il est en prison. A quel moment fait-il la demande aux Colossiens de prier
pour sa libération ?
Il terminera juste sa lettre par "souvenez-vous de mes liens",
pas dans le but de se faire plaindre où d’attirer sur lui l’attendrissement
général, mais pour les exhorter à la piété ; et il leur demandera de prier
plutôt pour l’opportunité qu’il a d’être en prison. Priez pour moi Colossiens,
mais pas pour qu’une porte s’ouvre vers l’extérieur, mais dans le sens qu’une
porte s’ouvre pour annoncer le mystère de Christ.
Donc soyons zélés, Paul ne peut pas prier contre ce qu’il enseigne.
Il adore le Père en Esprit et en vérité.
Quand il exhorte les Romains en leur disant de faire mourir les actions du
corps et de la chair, ou lorsqu’il leur conjure de ne pas vivre sous un esprit
de servitude et de crainte, il veut leur faire remarquez que leurs prières
comme leurs actions sont bien différentes de ce qu’il croit, lui.
Que croit-il, lui, justement ?
« Tous ceux qui sont conduits par l’esprit de Dieu sont
fils de Dieu…car vous avez reçu un esprit d’adoption.. »
(Romains 8 :14). Cà c’est s’est ce que croit et manifeste
Paul: un esprit d’adoption conduit par l’Esprit de Dieu.
On ne devrait pas prier selon notre volonté, mais faire comme Jésus qui voulut
nous enseigner que la chair refuse de prendre la dernière coupe ; la chair
refuse la souffrance, elle rejette la coupe de la souffrance.
« Père, si tu voulais éloigner de moi cette coupe ! Toutefois, que ma
volonté ne se fasse pas, mais la tienne. »
Contrairement à nos désirs et à notre envie de confort, nous devons nous attendre à souffrir,
et à endurer des épreuves pour le Seigneur. Et nous ne devons pas prier pour
qu’il aplanisse notre chemin et y enlève les
obstacles. Sinon, c’est notre couronne que nous jetons
à terre, cette couronne de vie ou de gloire qui s’obtient dans la persévérance
et dans la persécution.
Un disciple prie dans le sens de la justice et sa prière devrait s’orienter
très souvent vers cette réponse que Jésus faisait aux religieux.
« Je ne fais rien de moi-même...parce que je ne cherche pas ma
volonté mais la volonté de celui qui m'a envoyé. »
La réponse de Jésus, c’est vrai, est vague, peu précise et elle ne
renseigne pas sur les choses à faire dans l’immédiat. Elle témoigne uniquement
d’une dépendance totale.
Elle est très déstabilisante, reconnaissons-le pour un croyant tiède qui
aime être rassuré sur son avenir et sur ce qu’il doit faire là maintenant, en
tous les cas pour agir au plus vite.
Nous savons tous, nous croyants, que c’est dans la faiblesse que nous
sommes rendus fort. « L’Esprit nous aide dans notre faiblesse, car nous
ne savons pas ce qu’il convient de demander dans nos prières »
(Romains 8 :26)
Laissons le Seigneur s’exprimer à travers nous, même par des soupirs
inexprimables, c’est lui qui sonde les cœurs et c’est lui qui nous parle.
Alors
prions :
« Seigneur!
Que ta volonté soit faite et non la mienne ! Et n’éloigne de moi aucune
coupe de souffrance et de sacrifice, car je sais qu’avec toi je peux tout
supporter ! »
Cependant, il ne faut pas s’illusionner et se voiler la face, mais le
constat est là : malgré l’envie et leur désir sincère, beaucoup ne parviennent pas à
faire la volonté de Dieu, pourquoi?
Eh bien il leur manque une étape ; et cette étape c’est d’être
comme l’agneau, comme cet animal de sacrifice.
Alors offrons nos corps en sacrifice comme une offrande, comme Jésus a été l'agneau immolé.
Paul nous montre par sa vie, que son but n’était pas d’échapper à ses
agresseurs, ou de fuir le mal, mais d’attacher sur l’autel des sacrifices, la partie
de sa chair qui refusait de mourir en lui et de l’attacher avec des liens
d’amour (car ces liens sont placés par amour pour notre Dieu en premier).
Si nous avons la même intention que Paul, Dieu nous aidera alors à
sacrifier sur l’autel ce qui est trop longtemps resté accroché à nous.
Des exemples de chair à brûler ?
Ce sont des parties de nous que nous que nous avons chéri, à force dans être l'esclave.
Ce sont des parties de nous que nous que nous avons chéri, à force dans être l'esclave.
Ce sont des paroles de médisances, de la calomnie, des paroles de jugement
contre des proches ou contre les gens du monde, une grande émotivité qui passe
avant la paix intérieure, s’enflammer pour tout et pour rien, prendre une place
qui n’est pas la sienne, parler hors contexte de ses anciens péchés, contester
sans cesse les conseils, se placer en donneur de leçons, être moralisateur à
souhait, se vanter d’œuvres que l’on fait pour Dieu, se rabaisser au contraire
constamment, s’en vouloir et se placer toujours en victime lors d’un échec, se
sentir incapable, inutile et le confesser, avoir des pensées obsédantes, se
sentir fatigué et lassé de tout…etc.
Ces démons doivent être chassés, confessées et consumées, il est temps ensuite
de nous éloigner de l’autel et de ne plus regarder ni de ne plus parler de ce
qui a été brûlé, sacrifié et abandonné au Seigneur et cela pendant un certain
temps, le temps que la purification totale puisse être faite (il y a un nombre
de jours nécessaire à accomplir, je le redis)
Par conséquent, offrir cette part douloureuse car aimante, de notre chair comme un sacrifice : c’est l’offrande suprême qui nous
permettra réellement de prier : « Père
que ta volonté soit faite » sans regarder en arrière et sans regretter
ce qui a été mis sur l’autel. Cette
ferme décision nous débarrassera profondément du vieil homme, de cette vielle
nature qui refuse de faire la volonté de Dieu.
Amen
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