dimanche 25 février 2024

TRAVAILLER À SON SALUT (avec crainte et tremblement)

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Par Eric Ruiz

Philippiens 2 :12 : « travaillez à votre salut avec crainte et tremblement, ».

Je sais que pour certains croyants, travailler à son salut avec crainte et tremblement se concrétise par le fait de se contraindre à faire des efforts continus. Sans se plaindre pour autant, ils font un travail fatiguant qu’ils ne trouvent pas toujours aisé pour Dieu.

Pourquoi ?

Parce qu’ils voient leur salut comme un salaire. Et un salaire vient toujours à la suite d’un travail.

-Alors les voilà redoublant d’œuvres d’évangélisation ; les voilà semant leur témoignage partout où ils vont ;

-les voilà se mettant en quatre pour le service à l’Église. Ils se forcent à être aimables et généreux avec tous. Ils endurent des injustices en s’efforçant à ne pas répliquer. Parce qu’ils estiment leurs souffrances du moment, comme la condition nécessaire pour mériter ce salaire.

Le problème n’est-il pas dans le fait de voir son salut comme le fruit d’un labeur épuisant, pesant, parce que le fardeau est lourd à porter ? Faut-il nécessairement que la piété rime avec sueur, lassitude ou contrecœur ?

L’exemple de ces croyants (dont je faisais partie aussi) me rappelle les ouvriers de la onzième heure. Cette parabole de Jésus que l’on trouve dans Matthieu au chapitre 20, où tous les ouvriers sont payés un denier, qu’ils aient travaillé  toute la journée ou une seule heure dans sa vigne. Ceux qui avaient travaillé plus longtemps trouvèrent injustes d’être payé comme les autres. Eh bien ces ouvriers qui crient à l’injustice sont comme ces croyants qui pensent que tout ce qu’ils font pour Dieu aura du poids pour leur salut ; qu’ils seront mieux considérés que les autres parce qu’ils font moins qu’eux.

Ils ont beau crié que le salut s’acquiert par la foi et non par les œuvres, n’empêche qu’ils redoublent d’œuvres en tout genre pensant qu’elles ont néanmoins un rôle pour leur éternité.

Rappelons-nous les 12 fils de Jacob et plus précisément son neuvième fils : Issacar  qui signifie : « accorder un salaire, donner une récompense ».

Léa, première épouse de Jacob reçoit ce fils Issacar comme un salaire.  Léa avait arrêtée d’accoucher. Sa servante Zilpa avait pris le relais. Mais sa sœur Rachel toujours stérile, convoitait les mandragores qu’elle avait (au passage les mandragores sont des plantes médicinales qui avaient la réputation de favoriser la fertilité) ;

Alors, Léa offrit généreusement ses mandragores à Rachel, qui lui donna en retour, l’autorisation de faire un  autre enfant avec son mari Jacob. Issacar fut donc reçu comme une récompense, comme le fils mérité à cause de la générosité de Léa envers sa sœur stérile.

Il faut bien comprendre cette anecdote biblique pour saisir la suite qui va dans le même sens d’une récompense accordée par mérite.

Maintenant, le salaire est souvent associé à l’ouvrier dans la Bible.

L’ouvrier attend son salaire nous dit Job 7 :2. Le  croyant est comme l’ouvrier lui-aussi il attend son salaire. Et son salaire c’est le salut. Mais n’oublions pas que la Bible nous met en garde contre les ouvriers d’iniquité qui reçoivent eux aussi un salaire. Donc, ne nous trompons pas de travail.

Et comment ne pas se tromper ?

Alors revenons à Issacar. La prophétie de Jacob dans Genèse 49 : 14-15 dit : « Issacar est un âne robuste, Qui se couche dans les étables. 15 Il voit que le lieu où il repose est agréable, et que la contrée est magnifique; Et il courbe son épaule sous le fardeau, il s'assujettit à un tribut. ».

Pourquoi Jacob compare son fils Issacar à un âne robuste, d’abord ?

L’âne, c’est vrai, représente l’humilité chez l’homme. Jésus entra dans Jérusalem, assis sur le dos d’un âne.

Mais l’âne robuste, a une fonction supplémentaire : il porte des charges lourdes, des fardeaux ; et ils se déplacent avec eux. C’est une bête ouvrière qui travaille pour son maitre. Et si l’âne couche dans les étables : C’est qu’il est bien traité, qu’il est bien considéré par ses maitres. 

Quel est le croyant aujourd’hui qui n’est pas considéré, respecté et même loué pour le temps et l’énergie qu’il passe à faire des œuvres pour l’Église, donc pour Dieu ? Son travail généreux lui donne la position d’humilité. Ses actes sont alors pointés en exemple.

Ce croyant se sent d’autant plus dans la vérité qu’il voit partout autour de lui la bénédiction.

Verset15 : « Il voit que le lieu où il repose est agréable, Et que la contrée est magnifique ».

C’est une réalité qu’il met sous le compte du salaire lié à ses œuvres de piété. Il est satisfait de là où il demeure et la quantité de ses récoltes sont pour lui, le fruit d’un salaire mérité par son travail.

 

Maintenant, la prophétie de Jacob nous dévoile de quel type est ce travail : Et il courbe son épaule sous le fardeau, Il s'assujettit à un tribut ».

Courber son épaule nous renvoie à la pénibilité du travail. Cette pénibilité qui donne au travail toute sa valeur.

Et le verbe s’assujettir nous renvoie au fait que l’ouvrier ici aime se donner des œuvres pénibles à faire. Il aime se rendre esclave de certaines pratiques.

D’autant qu’un tribut se traduit aussi de l’hébreu par une corvée.

Le croyant se donne volontairement des corvées à faire, ou les accepte volontiers (donc il s’engage pour des actions qu’ils n’aiment pas faire, mais qu’il fait par obligation).

Il se soumet à des obligations qui deviennent des habitudes, des rites.

Un tribut : c’est aussi un impôt.  Croire que sa liberté en Christ s’achète à prix d’argent en s’acquittant de dimes et d’offrandes, n’est-ce pas aussi se rendre esclave de certaines pratiques ?

Où est la liberté de donner s’il y a un impôt obligatoire pour l’Église ?

La question est alors : Devons-nous faire des œuvres pénibles, que nous n’aimons pas, pour nous rendre agréables à Dieu ?

(Comme s’efforcer de pardonner, se forcer à aider certaines personnes, faire des efforts pour des choses que l’on n’aime pas au fond de soi, ou participer à des offrandes forcées ?)

Je trouve que l’âne est bien trouvé. Cet animal à la réputation d’être obstiné, têtu.  Ce caractère montre bien en parallèle celui du croyant qui met sa confiance dans ses propres œuvres. Il le fait de manière obstinée. Malgré les remarques ou les conseils pour qu’il arrête ou du moins qu’il réduise son activité, ce croyant continue de s’obstiner dans cette forme de piété rude et austère (qu’on appelle ascétique : une vie ascétique). Il voit une vertu exemplaire dans les efforts qu’il fait pour Dieu. Il pense qu’en se forçant à bien faire, et à faire beaucoup, il crucifie ainsi sa chair qui lui hurle de faire le contraire.

Mais où voit-on que les commandements de Dieu sont pénibles ?

C’est 1 Jean 5 :3 qui nous répond : « Car l'amour de Dieu consiste à garder ses commandements. Et ses commandements ne sont pas pénibles ».

Alors maintenant, dans le livre de la Genèse toujours au chapitre 49, il y a une prophétie attribuée au cinquième fils de Léa… à Juda.

Pour Juda, l’âne est pris aussi comme référence. Mais contrairement à Issacar, Juda ne se soumet pas à une corvée ou à un impôt.

Lisons au verset 11 : « Il attache à la vigne son âne, et au meilleur cep le petit de son ânesse; ».

Juda n’est pas un âne robuste, parce qu’il n’œuvre pas dans la douleur. Juda est un jeune lion (verset 9).

«  Il se couche comme un lion, comme une lionne: qui le fera lever? », nous dit le texte de la Genèse. Juda est libre d’agir. Il n’a pas d’œuvres obligatoires à faire. Il se lève et se couche quand il en a envie.

Ce n’est pas lui qui est de corvée ; mais son âne. Cet animal domestique représente celui qui travaille pour lui, c’est son ouvrier ; et son ouvrier n’est pas considéré comme un esclave. Il est même honoré. Il mange lui et sa famille les meilleurs fruits de la vigne.

En fait, vous l’aurez sans doute compris, l’âne robuste n’est pas une figure de Christ. Christ est humble comme l’âne, oui, mais il pratique les œuvres de son Père céleste. Les œuvres à pratiquer c’est : avoir le caractère de Dieu, le caractère de l’agneau immolé, et non celui d’un âne buté. « Le salut est à notre Dieu… et à l’agneau » (Apocalypse 7 :10).

Le caractère de l’agneau immolé nait par le Saint-Esprit. Ses œuvres consistent alors à nous garder du mal pour que l’esprit divin grandisse en nous et qu’il fasse grandir l’agneau.

Par conséquent, pour notre Père céleste, c’est lui qui porte nos fardeaux. C’est lui qui prend le rôle de l’âne pour ses fils. C’est lui qui fait les œuvres pénibles.

« Venez à moi, vous tous qui êtes fatigués et chargés, et je vous donnerai du repos. 29Prenez mon joug sur vous et recevez mes instructions, car je suis doux et humble de cœur; et vous trouverez du repos pour vos âmes. 30Car mon joug est doux, et mon fardeau léger (Matthieu 11 :29-30) ».

Un vrai disciple est doux et humble de cœur comme un agneau et il agit dans le repos. A l’inverse, si nous faisons des œuvres pour être humble ou pour montrer notre humilité, nous serons comme un âne : fatigués et chargés, parce nous portons à ce moment-là des charges que Dieu ne souhaite pas que nous portions.

Issacar portait des charges inutiles. Issacar se fatiguait beaucoup. Dieu lui en a-t-il voulu ?

L’a-t-il blâmé et maudit à jamais ?

Ceux qui ressemblent à Issacar ont tous la possibilité de revenir à Dieu, comme ce fut le cas au temps du roi Ézéchias.

Lisons ce passage dans 2 Chronique 30 à partir du verset 18 :

« Une grande partie du peuple, beaucoup de ceux d'Ephraïm, de Manassé, d'Issacar et de Zabulon, ne s'étaient pas purifiés, et ils mangèrent la Pâque sans se conformer à ce qui est écrit. Mais Ézéchias pria pour eux, en disant: Veuille l'Eternel, qui est bon, pardonner 19tous ceux qui ont appliqué leur cœur à chercher Dieu, l'Eternel, le Dieu de leurs pères, quoiqu'ils n'aient pas pratiqué la sainte purification! 20L'Eternel exauça Ezéchias, et il pardonna au peuple ».

Donc, avec un cœur qui cherche Dieu, la repentance est possible pour tous ceux qui comme Issacar se fatiguent dans des œuvres inutiles, qui ne sont pas inscrites dans la loi de Christ.

Et si nous voyons des proches porter des charges lourdes, en se fatigant. Notre rôle n’est-il pas de les aider à les porter, pour les soulager (Même si nous savons qu’ils se fatiguent inutilement) ?

Ne les jugeons pas, ne les prenons pas de haut ; Galates 6 :2 : « Portez les fardeaux les uns des autres, et vous accomplirez ainsi la loi de Christ. »

La loi que l’on trouve dans le livre d’Exode 23 :5 devrait naturellement se trouver dans le cœur de chaque croyant ; car même si ton ennemi souffre et que tu peux le soulager, tu l’aideras : « Si tu vois l'âne de ton ennemi succombant sous sa charge, et que tu hésites à le décharger, tu l'aideras à le décharger. ».

Alors, n’ayons pas honte d’avoir été un âne robuste pour soi parce qu’on se sentait ainsi mieux aimé et mieux considéré des autres. N’ayons pas honte non plus en ayant été un âne robuste pour les autres. Je dis pour les autres aussi, car ne soyons pas dupes, beaucoup de serviteurs de Dieu paresseux et méchants aiment s’entourer d’ânes pour les contraindre à porter des fardeaux lourds et pénibles qu’eux ne porteraient jamais. C’est Jésus de Nazareth qui le dit : Luc 11 :46

«  Malheur à vous aussi, docteurs de la loi! Parce que vous chargez les hommes de fardeaux difficiles à porter, et que vous ne touchez pas vous-mêmes de l'un de vos doigts. ».

-Travailler à son salut nécessite de porter aucun lourd fardeau, de n’être sous le joug d’aucune obligation aussi pieuse soit-elle.

-Travailler à son salut nécessite de garder la parole que nous avons reçue. Car garder la parole de Dieu c’est faire sa volonté. Une volonté qui n’a rien de pénible puisqu’elle est guidée par l’amour, l’amour de l’autre, par son besoin ; et non pas par une obligation légaliste.

-Travailler à son salut avec crainte et tremblement nécessite donc  (comme le verset suivant le dit) de décider que c'est « Dieu qui produit en nous le vouloir et le faire, selon son bon plaisir ».

Amen

 

 

 

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