dimanche 3 février 2019

LE POISON DE LA COMPARAISON

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 Par Éric Ruiz

Nous vivons dans une société où la compétition règne en roi. Il faut pour réussir être meilleur que l’autre.
C’est ce poison qui est d’ailleurs enseigné dès le plus jeune âge à l’école. Il insuffle aux enfants l’idée que leur valeur se mesure non par rapport à eux-mêmes mais par rapport aux autres, comme si la satisfaction se trouvait davantage dans le dépassement des autres que dans son propre perfectionnement.

Ce poison s’appelle la comparaison.

https://youtu.be/lNExGiMEuN4
Rappelons-nous notre enfance à l’école : Dans une grande majorité de scènes d’enfance, c’est la comparaison qui nous a fait souffrir.
L’école française est une école de classements, de rangs, avec les copies rendues devant tout le monde, elle sait (cette école) distiller le poison de la comparaison dès le plus jeune âge.

L’Eglise, elle, échappe-t-elle à ce lien social (je parle là aussi du lien comme d’une chaîne qui paralyse, ou d’un fardeau lourd à porter) ?

A force de comparaison, l’esprit du monde est entré dans l’Eglise.
Le croyant est toujours en train de se comparer aux autres. On met dans la balance les témoignages des uns, des autres. Certains sont tellement embellis ou romancés à l’extrême, et  d’autres, sont si dévalués, si dévalorisés.
 
Alors des chrétiens chevronnés, se voient plus saints que ceux qu’ils côtoient, ou qu’il croit connaître, ou ils s’évaluent plus bénis que les autres et donc leur estime de soi brille au grand jour.
Ils se sentent d’une certaine manière par leur « meilleure connaissance »,  avoir reçu le don d’enseigner, celui d’instruire l’autre, ou celui de pouvoir reprendre son frère comme ils le veulent.

A contrario, d’autres croyants sont toujours en train de se sous-estimer, pensant que les autres sont meilleurs, qu’ils agissent avec plus de foi, qu’ils sont plus dans la vérité ; et pour certains ils sont même tombés dans un fatalisme qui les pousse à dire que c’est leur façon de porter leur croix après tout, c’est une souffrance nécessaire, et que dans le corps de Christ il doit y avoir aussi, comme dans le corps humain, des organes moins importants que d’autres (comme l’appendice, cette petite excroissance intestinale, par exemple) : c’est horrible de penser cela de soi.

Et puis il y a aussi (et je pense un bon nombre, pour ne pas dire la majorité) qui oscillent entre les deux.
Ils sont parfois bénis, au point où si Dieu revenait là, ils seraient immédiatement sauvés et à d’autres moments ils se sentent indignes du salut et rejetés de la grâce.
Je ne leur jette pas la pierre, je faisais moi-même parti de ce troisième groupe de croyants il n’y a pas si longtemps.

Dieu bannit la comparaison, car elle n’amène que de l’idolâtrie.

Pour le premier cas, l’excès de confiance fait mousser, briller l’ego de la personne, on devient le centre du monde.
Dans le deuxième cas, se voir toujours en dernier, provoque une soumission vis-à-vis de ceux considérés comme des gens de foi, des oints, des enseignants, des maîtres, ceux appelés à un meilleur ministère.
Et dans le dernier cas, l’instabilité montre une foi fragile et un état facilement influençable qui pousse le croyant pour se sécuriser, à se construire aussi des modèles, des étoiles de la foi.

Dans les Eglises, la bénédiction est vécue comme un baromètre.
Sur l’échelle des degrés, celui qui est au plus haut se croit béni plus que les autres ; et celui qui est au plus bas n’a visiblement rien reçu.
Le premier se sent alors investi d’un devoir d’exhortation, de moralisation sur le deuxième.


Ces trois cas cités ici, sont des perversions de notre chair et par extension des productions du système babylonien qui est un système de classement, qui distribue médailles, diplômes et félicitations au meilleur et qui classent les plus riches et les plus influent à la tête de la pyramide sociale.

Ce système date, c’est vrai, de la nuit des temps.
Mais Dieu nous met en garde contre les dangers qu’il porte.
Derrière la comparaison se cache toutes sortes de fruits empoisonnés : la convoitise, la jalousie, la frustration.
Ces fruits, une fois consommés entraînent des réactions violentes : querelles, animosités, conflits et pour finir la guerre.

Regardez le roi David (quand il fit le dénombrement de ses troupes, alors que Dieu ne le lui avait rien demandé) a sauté à pieds joints dans ce danger.
Il est même écrit que : « Satan se leva contre Israël, et il excita David à faire le dénombrement d'Israël » (1 Chronique 21 :1)

En quoi David pécha contre Dieu ?

Eh bien parce qu’il voulait par le recensement, comparer l’état de son armée, donc mesurer sa puissance, à celle des autres.
C’est une pensée diabolique, qui enflamme la chair, dans la sens où elle la pousse à dominer là ou Dieu n’a pas établi de droit.
Le roi David outrepassait ses droits en voulant par lui-même étendre ses frontières. Il voulait alors plus de ce que Dieu avait promis à Abraham.

Dieu nous met en garde des plaies, des souffrances qui incombent à ceux qui se perdent dans la comparaison.

« " Lorsque tu compteras les enfants d'Israël pour en faire le dénombrement, chacun d'eux paiera à l'Eternel le rachat de sa personne, afin qu'ils ne soient frappés d'aucune plaie lors de ce dénombrement. "(Exode 30:11-14).

Dieu demandait, avant de faire l’acte de recensement, de racheter à l’avance sa faute.
Pourquoi ?
Car il savait que cette tentation serait évidente (pour ne pas dire inévitable) pour chaque être humain.
Dieu savait que Satan attiserait cette part de Lucifer qu’il y a en chacun de nous ; C’est-à-dire que chacun aime se mesurer aux autres pour apprécier sa valeur, pour apprécier sa lumière (une valeur superficielle bien-sûr, basée sur ses propres forces…
Qui n’aime pas porter une lumière artificielle qui brille pour soi-même, et qui n’aime pas attirer la gloire à lui ?
Si vous souhaiter davantage de détail, j’ai fait le 11février 2016 un message sur le dénombrement).

Donc dans le concret pour nous : Racheter à l’avance sa faute revient à vouloir briser le pain chaque jour, c’est-à-dire, maintenir captif les envies de briller et de se comparer aux autres.
Et aussi, remettre dans la prière tout ce qui nous est apparu comme un recensement. « j’ai fait ceci, j’ai fais cela pour Dieu…je mérite donc… ou «  je n’ai pas fait ni ceci, ni cela, donc je ne mérite pas ».
Ce pain-là possède un levain, qui fait monter notre pâte, nos désirs, notre estime de soi au-delà de toute maîtrise possible.
Le résultat on le connait, on se fait davantage confiance ou on fait davantage confiance à un ministre de Dieu et par là on devient suffisant, on ne cherche plus la face de Dieu, mais on multiplie les actions « saintes ».

Ne pensons pas que faire des actes généreux à répétition font de nous un meilleur croyant.

Nous ne faisons pas pour avoir un cœur, c’est notre cœur qui nous amène à faire.

Alors, c’est vrai, Jésus, donne un commandement nouveau: celui d’aimer les autres comme soi-même.

Mais le nœud du problème est bien là : comment s’aimer soi-même ?
Comment s’aimer autrement que dans le but de briller davantage ?

La réalité, c’est que le véritable amour de soi est incompatible avec la comparaison.
La comparaison ne peut être que subjective et partiale, donc faussée.

Pour aimer les autres, nous avons besoin de nous aimer tel que nous sommes réellement.

Cela demande un jugement, dans le sens de discerner l’état de notre cœur.
Cet acte correspond spirituellement à un tonnerre ; c’est le premier tonnerre. L’éclair qui jaillit alors de ce tonnerre illumine complètement notre être intérieur et nous nous voyons alors comme Christ nous voit.

Revenons au départ :
Dans les assemblées, rien de nouveau, on reproduit ce qui se faisait déjà à l’école. Le prédicateur pense vous encourager en disant : « Soyez la tête et non la queue !»
 Il reprend à sa manière (Deutéronome 28 :13), qui dit :
« L'Eternel fera de toi la tête et non la queue, tu seras toujours en haut et tu ne seras jamais en bas, lorsque tu obéiras aux commandements de l'Eternel, ton Dieu, que je te prescris aujourd'hui, lorsque tu les observeras et les mettras en pratique ».

Là aussi, qui ne se culpabilise pas avec ce passage en se sentant à la queue, inutile pour l’œuvre de Dieu parce qu’il est en bas ; ou au contraire, qui ne se sent pas pousser des ailes, parce qu’il se voit en haut à la tête ?

C’est le Saint-Esprit qui fait de nous la tête et non pas nous, à notre manière, et selon nos désirs.
Et la bénédiction ne ressemble sans doute pas à celle qu’imagine notre vieille nature, comme de briller sur les autres ou d’être dans une abondante sécurité matérielle).

« Fais de l’Eternel tes délices et il te donnera ce que ton cœur désire ».

Avec ce verset des Psaumes, les Eglises ont flatté les désirs charnels de leurs membres, en pointant en ligne de mire: la convoitise.
Qui n’a pas alors apprécié la réussite sociale des autres comme des bénédictions ?  
Qui ne s’est pas trompé de richesse en évaluant les signes extérieurs de richesse comme un sceau de Dieu sur des êtres en odeur de sainteté ?
Voilà la pensée fausse qui a été véhiculée alors : Comme ils ont fait de l’Eternel leur délice c’est normal, c’est logique, ils ont été exaucés. (Une bien triste interprétation du Psaume).

Alors, à quoi fait référence notre Seigneur quand il promet des bénédictions ?

On ne devrait même pas en parler… car l’Esprit saint en nous créé nos désirs.
Le cœur d’un disciple n’aspire pas à la fortune et à la gloire (même si les richesses matérielles ne lui sont pas exclues).
Il aime naturellement ce que son Père céleste désir et aime. Il aime les choses d’en haut, comme :
·       voir des gens se libérer de leur péché, de la maladie, de la souffrance.
·       voir le péché reculer et ne plus avoir d’effet dévastateur sur eux,
·        il aspire à voir sa famille recevoir le même héritage que lui, (l’héritage spirituel : c’est l’esprit saint et les fruits qu’il procure)
·       il se réjouit de partager une communion fraternelle vraie et authentique avec des frères et sœurs simples et sans masques.
Les victoires sont bien là, plus dans la qualité de nos relations que dans le chiffre et le nombre.
Remarquez bien une chose d’ailleurs, quand Dieu vient nous réveiller, il le fait dans un environnement presque hostile, avec une communion restreinte. On peut croire extérieurement à un abandon, alors que c’est un travail en profondeur qui se réalise.
Gédéon après avoir échappé à son propre lynchage collectif, a été préparé avec quelques membres de sa famille et une petite troupe de soldats réputés pour leur humilité.

Mais ce n’est pas fini…le poison de la comparaison va encore plus loin.

Le pire, je crois est d’avoir comparé Christ à ses disciples.

D’avoir mis Christ comme le maître et le disciple comme serviteur ; et à partir de là, d’ériger cette relation comme un dogme absolu, une certitude théologique.
Cette relation est fausse, Jésus lui-même affirme autre chose : « Le disciple n'est pas plus que le maître; mais tout disciple accompli sera comme son maître. »

Jésus annonce lui-même une finalité d’égalité et non de hiérarchie.

Le dogme religieux (qui a toujours eut un problème avec la pureté) part de la pureté du Fils né de l’esprit saint par une vierge… pour aller plus loin : il le rend incapable d’aucune souillure.
S’il est incapable de péché, alors pourquoi a-t-il appris bien qu’il fut Fils, l’obéissance au Père ; l’obéissance en souffrant, car c’est un homme, comme les autres après tout ?
« Il a été exaucé à cause de sa piété, a appris, bien qu'il fût Fils, l'obéissance par les choses qu'il a souffertes » (Hébreux 5 :7)
« Il a été tenté comme nous en toutes choses, sans commettre de péchés. »(Hébreux 4 :15)

Pour nous, hommes et femmes pécheurs, même si le départ est différent (car nous ne sommes pas né par le Saint-Esprit d’une vierge), l’objectif reste le même : finir la course à égalité sur la ligne d’arrivée.
Car ce n’est pas pour Christ que nous courrons vers le but.
Ce n’est pas pour Christ que nous souffrons.
La différence est cruciale : c’est EN Christ que nous gagnons la course et c’est en Christ que nous souffrons.
Si nous faisons les choses avec lui, nous nous comparons à lui. Si nous les faisons en lui, nous nous épousons mutuellement.
Il n’y a aucune différence entre Christ et un disciple accompli, c’est une égalité parfaite.
Christ et son épouse c’est l’égalité parfaite.
« Christ en vous, disait Paul, l’espérance de la gloire »
Oui, Christ en nous, pour partager sa gloire. « afin de présenter à Dieu tout homme, devenu parfait en Christ »(Colossiens 1 :28).

Mais voilà, pour atteindre l’égalité avec lui, nous devons auparavant atteindre un autre but.
Cet autre but c’est l’équité.
L’équité ce n’est pas l’égalité. L’équité précède l’égalité
Je m’explique :
L’équité : c’est que nous devons au préalable vivre les mêmes souffrances, les mêmes injustices.
Parce que je le répète : nous ne devons pas souffrir pour lui mais bien : souffrir en lui.
Alors, pourquoi comparer ce que nous sommes, nous disciple impur mais purifié par Christ à Christ lui-même, qui est pur par essence et par naissance ?

A quoi sert concrètement cette comparaison, sinon à refuser de marcher sur le chemin de la purification ?

Toute doctrine religieuse a un but charnel.
Quand nous ouvrons les yeux sur ce but, nous y voyons le poison de la comparaison.

La comparaison, nous devons en être persuadé est née de l’esprit diabolique.
La comparaison est de naissance diabolique.

Un homme charnel sait en lui qu’il ne pourra jamais se soustraire au péché. Il aime trop ses fautes qu’il essaye de cacher par toutes sortes d’actes religieux.
Voir Christ parfait et inatteignable dans sa vie mortelle, a pour intention et effet de se protéger et de faire admettre l’impuissance à pouvoir devenir comme Christ, parfait, ici-bas.
Christ nous verrait-il parfait mais par la foi ? (un parfait en devenir, au ciel seulement ?)

Cette idéologie religieuse est en fait un aveu d’impuissance.

Qui est plus fort : la chair ou l’Esprit ?
Si la chair est plus forte, le Saint-Esprit n’est pas de grande utilité, la résurrection de Christ n’est alors pas meilleure que la loi mosaïque.

Non décidément, nous n’avons rien à voir avec cette idéologie restrictive.
Le but bien réel est d’être participant à la nature divine, d’atteindre la stature parfaite de Christ, pas une stature miniature ou incomplète, non la stature, c’est-à-dire : la position humaine, la hauteur de corps parfaite.

Mais comment vouloir atteindre la stature parfaite de Christ sans la vertu ?
Pierre le rappelle : Nous devons joindre, à la foi la vertu.
Tous ceux qui comparent (avec un but inavoué de se cacher) ont choisi une foi sans vertu. Une foi sans les actes.
La vertu c’est (nous dit le dictionnaire) « un comportement permanent et volontaire qui nous pousse vers le bien, et cela en dépit des obstacles ».

Alors en tenant compte de tout cela, cessons de comparer ce qui n’est pas comparable. Cessons de nous comparer nous qui aimons Christ et qui voulons faire sa volonté.
Notre Dieu veut une relation qui suit une évolution horizontale, égalitaire et non verticale et hiérarchisée.
La relation entre Jésus, Fils, Père et Saint-Esprit n’est qu’horizontale et nous devons devenir des disciples accomplis, comme notre maître et suivre cette logique dans nos rapports entre nous.
« Jusqu’à ce que nous soyons tous parvenus à l'unité de la foi et de la connaissance du Fils de Dieu, à l'état d'homme fait, à la mesure de la stature parfaite de Christ » (Éphésiens 4 :13)

Par conséquent, brisons le pain chaque jour en reconnaissant nos fautes ; reconnaissons nos actes de comparaison et bénissons le Seigneur qui nous permet d’être comme lui, un maître.
Amen

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